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 3i          DE L'ÉTAT ACTUEL DE LA PHILOSOPHIE

 vrai que certains faits semblent se passer exclusivement en
 nous, et constituer la vie propre à l'intelligence, tandis que
 d'autres phénomènes semblent exprimer plus particulière-
 ment notre passivité, notre sensibilité, d'autres noire activité,
 notre volonté. Drobisch consent même à adopter et à suivre
 dans son ouvrage la division ordinaire des faits de la cons-
 cience en faits intellectuels, faits sensibles et faits volontaires ;
 mais un examen approfondi de ces phénomènes montre,
 selon lui, qu'ils ne sont pas si différents qu'on le suppose
 d'ordinaire. Nous pouvons penser sans vouloir ou sentir; mais
 nous ne pouvons ni sentir sans avoir en nous une pensée
 vague, ni vouloir sans que notre intelligence sache plus ou
 moins clairement ce qu'elle veut. Un sentiment n'est autre
 chose qu'une idée à moitié combattue par une seconde, a
 moitié soutenue par une troisième; un désir ou un mouve-
 ment de volonté : c'est une pensée qui s'élève victorieusement
dans notre conscience et qui triomphe de tous les obstacles.
D'où il suit que sentir et vouloir se réduisent à penser, et que
l'effort de la volilion, comme les émotions de l'ame, s'expli-
que par l'union ou l'opposition des idées.
    C'est ainsi que Condillac ramenait jadis toutes nos facultés
à la seule sensation ; que Leibnilz, auquel la théorie herbar-
lienne est empruntée, n'admettait dans la monade d'autre
changement que celui des perceptions; que Fichie, Schelling
et Hegel ont introduit dans la philosophie une unité factice
sur les ruines d'une diversité réelle et irrécusable. Le même
tort doit être reproché à tous ces esprits illustres qui ont cru
trouver 1<; mot de toutes les énigmes, l'un dans la sensation,
un autre dans la perception, un autre dans la pensée la plus
abstraite : tous ont sacrifié les richesses diverses de la réalité
à la froide uniformité d'un faux système. Nous nous étonnons
que le herbartianisme ait pu tomber dans ce défaut, lui qui
d'ordinaire se garde bien de donner dans la manie, presque