page suivante »
16 DE L'ÉTAT ACTUEL DE LA PHILOSOPHIE formules pour gagner les esprits par une profondeur qui ne nuit pas à la netteté des pensées. Les allures par trop géo- métriques de Herbarl ont disparu pour rendre les idées spé- culatives intelligibles à un cercle de lecteurs plus étendu que celui des mathématiciens philosophes. Editeur des ouvrages de Kant, ainsi que des écrits posthumes et des dissertations éparses de Herbart, Harlenstein s'est montré digne élève du philosophe, dont il a recueilli les illustres travaux, et du maître dont il vénère religieusement même les esquisses ina- chevées. Se livrer à des recherches philosophiques, c'est, pour ces deux disciples de Herbart, analyser les principes générale- ment reçus, rectifier par le moyen d'une réflexion systéma- tique les erreurs de la pensée vulgaire. La philosophie ne se fonde, selon eux, ni sur des principes aprioriques, ni sur une idée-mère de laquelle découlerait tout le système. Bien au contraire, elle part de données expérimentales et multiples. Le herbarlianisme accepte, pour ainsi dire, comme matière sur laquelle il s'exerce toute la somme des pensées que nous trouvons en nous et autour de nous dans la civilisation au milieu de laquelle nous vivons. Soumettant à sa critique ces notions et ces jugements que nous adoptons d'ordinaire sans réflexion, sur l'autorité d'une expérience superficielle et vul- gaire, il s'assure de leur justesse ou de leur fausseté, et du degré de cerlilude dont ils sont revêtus. La philosophie est donc Yélaboralion des notions fournies par l'expérience. Elle s*élève sur le terrain de l'observation ; mais comme elle rec- tifie les idées qu'elle y découvre, comme elle les métamor- phose, les redresse et les complète au moyen d'une réflexion scientifique, son but est au-delà de la sphère d'un empirisme qui se refuserait à la spéculation. Après cette définition assez vague, qui assigne au herbar- lianisme une place mitoyenne, mais incertaine, et qui, faute