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38                   LA REVUE LYONNAISE
   Mais quittons vite ces tristes pensées de l'avenir pour en revenir
à Isabeau, nouvelle mariée. Gaspard conduisit sa jeune épouse
dans son château de Feugerolles pour en être la dame.
   Les bâtiments étaient extérieurement à peu près dans l'état où
on les voit aujourd'hui, Alexandre de Capponi, père de Gaspard,
avait fait élever en 1600, sur les ruines de la partie sud du châ-
teau démantelée pendant la Ligue, des constructions flanquées du
lourd cavalier, nommé tour de Henri IV, qu'il avait destiné à
remplacer, pour la défense éventuelle, le beau donjon de forme
ronde, dont les fondations existent encore à fleur de terre à quel-
ques pas de là. Il aurait mieux fait de le relever, car il eût res-
titué, ainsi à l'ensemble de la forteresse l'aspect imposant que ce
donjon devait lui donner en la dominant de tous côtés. Mais la
terrasse extérieure (dite le boulevard, à cause d'un ouvrage
avancé qui existait autrefois en cet endroit) et celles qui s'étagent
dans les cours n'existaient pas encore ; ces cours en pente n'étaient,
par le fait, que la naissance du flanc de la montagne, partant du
pied du rocher qui supporte le château ; on pénétrait dans celle dite
du Donjon par la porte en ogive qui est fermée par une herse de fer
et a fait placé, pour l'usage ordinaire, à sa voisine plus accessible
et qui fut, plus tard, l'œuvre de Gaspard lui-même. Les ravages
de la guerre civile étaient à peine réparés ; rien encore n'était
consacré à l'agrément. Gaspard et Isabeau créèrent le jardin, les
terrasses et la charmille. Cet ensemble n'avait rien d'attrayant ;
mais il faut se reporter, par la pensée, aux temps si profondément
troublés -qu'on venait de traverser et qui avaient certainement
réduit le château des Cremeaux à un état semblable. D'ailleurs,
tous ceux de notre contrée avaient été plus ou moins dévastés au-
tant, on peut le dire, par les amis que par les ennemis. N'est-il
pas inutile d'ajouter que ce nid d'aigles, entouré alors de grands
bois de chênes et de pins silvestres, n'était accessible que par des
chemins en partie taillés dans le roc et praticables seulement pour
les cavaliers ou les chars rustiques. On voit encore les sillons creu-
sés dans les rochers par leur passage pendant plusieurs siècles !
  Quant au château de Roche-la-Molière, qui appartenait alors à
Françoise d'Augerolles de Saint-Polgue, veuve d'Alexandre de
Capponi, et qu'Isabeau habita si souvent auprès de sa belle-mère,