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UN HUMORISTE LYONNAIS Nizier du Puitspelu, qui jusque-là avait â peine côtoyé la poli- tique, mit un pied, puis deux, puis le corps tout entier dans le courant à partir de cette époque. Un instant dans le Progrès, plus longtemps dans le Salut public, où il prit le pseudonyme d'ignotus, surtout dans le Journal de Lyon, où il emprunta le nom deValère, son meilleur ami, il publia, à diverses reprises, de nombreux articles, qu'il a réunis en deux volumes, en 1881, sous le titre de Lettres de Valère, avec une introduction auto- biographique, que j'ai utilisée le plus possible. Ces articles vont du 20 décembre 1869 jusqu'en février 1874, et l'auteur y a joint un piquant Courrier des Eaux, daté du 15 août 1871, et trois lettres humoristiques des 3, 11 et 17 novembre de la même année, inti- tulées : Le Pays où nous promenons, ce qui désignait une petite localité du département de la Drôme. 11 n'est ni dans mes goûts, ni dans mes habitudes de déraisonner sur la chose publique, et d'ailleurs les conditions du recueil où j'écris ces lignes ne le com- portent point : je me bornerai donc à indiquer par quelques traits le but et la nature de ces Lettres de Valère. Quel bizarre polémiste et comme, avec tout le respect que j'ai pour lui, il me paraît peu prédestiné à gouverner l'Etat ; tâche pourtant qui a l'air d'avoir été mise à la portée de tout le monde, puisque tant d'individus s'en mêlent à tort et à travers ! Quoi ! à l'époque où nous sommes, dans le pays que nous habitons, quand il n'y a que troubles et discordes, quand les partis se subdivisent sans cesse davantage en fractions imperceptibles et d'autant plus hostiles les unes aux autres, quand la haine et l'insulte sont à à l'ordre du jour, quand l'idéal actuel est d'exagérer l'opinion qu'on est censé avoir, de déchirer ses concurrents, de tenir bou- tique de radicalisme et4'intransigeance, le candide Valère s'avise de dire la vérité à droite et à gauche, de prêcher la modération et la paix, d'arborer des principes de raison et de bon sens, de se poser en arbitre impartial et désintéressé ! Ce rôle à la Franklin n'est plus de notre temps; dans notre société, telle qu'elle est