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116 LA REVUE LYONNAISE Le corps du défunt porté sur une riche litière était suivi d'une quantité de lits funéraires, chargés des insignes de toutes les ma- gistratures qu'il avait obtenues durant sa vie; une longue file de ses esclaves et de ses serviteurs conduisait les animaux que l'on devait sacrifier pendant qu'on brûlerait le corps ; enfin sa voiture vide fermait la marche. Le cortège s'avançait ainsi jusqu'au Forum. Là on plaçait sur la tribune, debout, de manière à être vu de tous les assistants, le corps ou plus souvent un corps de cire fait à la ressemblance du défunt. Tout autour se groupaient les images des ancêtres, ceux qui avaient occupé des magistratures curules assis sur des sièges d'ivoire. Un orateur, rappelant les origines du défunt, faisait l'éloge de ses ancêtres représentés à celte pompe et l'énumération des principales actions de sa vie. Du Forum, on se dirigeait vers la voie Appienne, où un bûcher avait été préparé ; une enceinte de cyprès entourait ce bûcher en forme d'autel, composé de bois dilex ou de pesse, décoré de guir- landes, de rameaux et de verdure. Avant que l'on y déposât le lit sur lequel était le cadavre, la mère du défunt venait lui ouvrir les yeux, car on considérait comme un crime de priver le ciel du regard d'un mort; elle déposait entre ses dents le triens qui de- vait servir à payer le passage du Styx au nautonnier des enfers, et lui adressait ses derniers adieux. Alors, tandis que les trompettes et les flûtes se faisaient entendre de toutes parts, on déposait le corps sur le bûcher, et pour apaiser les mânes qui aiment le sang et le lait, on égorgeait les chevaux et les chiens favoris du défunt, on répandait sur la terre en forme de libations de grands vases de vin et de lait et des coupes remplies du sang des victimes. Puis les assistants se groupaient autour du bûcher; la face tournée vers l'orient, ils partaient par la gauche, et en faisant processionnellement le tour, y jetaient des parfums et des couronnes ; ils venaient ensuite se ranger autour de l'enceinte de cyprès, tandis que l'on plaçait sur le bûcher les animaux égorgés; les proches parents s'en approchaient, et détournant la tête y met- taient le feu au moyen d'une torche; la masse entière s'enflam- mait rapidement, grâce aux matières très combustibles, aromates et [larfums, que l'on avait à profusion répandues sur le corps et sur