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ISABEAU DE CREMEA.UX 37 sa race : Gaspard de Gapponi, baron de Feugerolles, petit-fils de Laurent et fils d'Alexandre de Capponi, de cette grande race qui subit delà part des Médicis, ses rivaux, le terrible vse victis, qui est l'histoire de l'humanité. Dieu avait donné Gaspard à ses parents, après une longue at- tente et pour exaucer le vœu fait à N.-D. de Lorette de le faire tenir sur les fonts baptismaux par deux mendiants. Nous en avons, dans la galerie de Feugerolles, le tableau votif : C'est une pein- ture du temps, des plus mauvaises, mais curieuse cependant. Gaspard avait perdu son père de bonne heure et fut élevé parmi les pages de Henri IV. Sur l'ordre du roi, il avait été conduit à la Cour par le marquis de Nerestang, son cousin, et, après avoir fait la guerre avec distinction pendant une partie de sa jeunesse, il résolut de se marier, et se retira, dit-il, « dans les délices de la vie privée, entre une mère et une femme, puissants charmes par les rares vertus que ces dames pratiquoient et l'estroite amitié qui estoit entre eux. » Gaspard ne renonça pas absolument, pour cela, au métier des armes ; on le voit quitter souvent ce foyer domestique qu'il semblait tant aimer, et Isabeau restait alors au- près de sa belle-mère, au château de Roche-la-Molière. Devançant le temps, ajoutons tout de suite ici qu'une autre rai- son encore le tint souvent éloigné de chez lui ; c'était un intermi - nable procès qu'il avait avec les Lévis pour la possession même de Feugerolles, et desquels Alexandre son père l'avait acheté. Il ga- gna le procès, mais il fit le tourment de son existence, et dans ces fâcheuses circonstances, Isabeau fut ce qu'elle devait être, le sou- tien et la consolation de son mari. Voilà ce que, dans son Livre de Raison, Gaspard dit à ses en- fants à propos de ce procès : « Vous cognoistrez les tristes occupations dans lesquelles la né- cessité d'une iuste deffense m'a contrainct d'employer et de con- sommer le plus beau de mon aage, et de passer mon temps, pendant l'espace de plus de 22 années. Et par là vous pourrez aisément iuger des travaux indicibles d'esprit et de corps que nous avons soufferts, votre défuncte et très-digne mère et moy, en ce fâcheux et pénible exercice auquel elle a enfin succombé, ayant finy ses jours sans avoir le bonheur et la consolation d'en voir l'issue. »