Revue lyonnaise » n°3 ( 1882 ) » pp.009

         DES DIVERS SYSTÈMES DE PSYCHOLOGIE                          à
de, tout le complément qui lui a manqué du côté des phénomènes
passifs ? _'        .
   Maine de Biran proclame le même principe que Descartes. « Nous
ne sommes actifs, assure-1-il, que par un seul sens, dans un seul
mode fondamental, »et c'est la volonté qui est cette unique faculté
de l'âme. Le philosophe deBergerac dérive de l'effort la totalité des
phénomènes psychologiques. Cette fois plus que jamais, l'affirma-
tion de l'unité est précise. « La sensation est tout, » avait dit Coh-
dillac:; « la volonté est tout, » réplique d'une façon non moins absolue
Maine de Biran. Et l'on a vu le psychologue, retiré dans son opi-
niâtre et solitaire étude du fait primitif de conscience, appliquer
toutes les ressources de son talent d'observation et d'analyse à ex-,
poser qu'il ne pouvait y avoir dans l'homme rien autre que le
surgissement de l'effort, que l'exertion de la volonté. Mâle et vi-
goureuse recherche, sur laquelle semblent se répandre les reflets des
admirables doctrines du Portiqïïe et du christianisme. Mais, comme
par le stoïcisme et par l'ascétisme chrétien, le but a été ici dépassé;
Toute seule, la volonté ne ferait que s'agiter dans le vide. La vo J
lonté ne serait suffisante à rendre raison de l'homme que s'il n'y
avait dans l'homme rien de plus que l'homme même. L'erreur de
Maine de Biran à été de ne pas noter avec la même exactitude ce
qui arrivait dans l'homme parla pénétration en lui de la nature
extérieure et par la pénétration divine. C'est la même faute à peu"
près que Descartes. Nous avons remarqué combien le psychologue
avait failli à l'interprétation philosophique des faits du côté de la
sensibilité, de l'intelligence et de la loi morale. Une immense la-
cune de la psychologie nous a été découverte, et la philosophie-de
 delà volonté, si belle,.si imposante, si conforme à nos fins mo-
 rales, si empreinte du sceau de noblesse delà nature humaine,ne
 nous a été laissée par Maine de Biran que comme une sublime effigie'
 de l'unité, attendant la main qui en restituerait les parties incer-
 taines, et qui, d'un fond indiscernable et confus, détacherait entiè-
 rement ses traits.                                                    -
  Unité fausse, aveG Condillac ; unité chancelante, avec Descartes ;
unité qui avorte dans l'explication d'une grande partie des faits,
avec Maine de Biran.
  Le besoin de partir de l'unité a tellement prise sur les hommes