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-, M. LOUIS BLANC -309 Plus tard, il publia d'importants ouvrages : h'Organisation du travail (1839); l'Histoire de dix ans (1842); l'Histoire de la Révolution française (1847-1862); les Lettres sur l'Angleterre, et joua dans la Révolution de février le rôle que l'on sait. Faut- il croire qu'au début de cette lutte pour ses idées, qui était peut être aussi une lutte pour l'existence, le jeune publiciste ne fut pas toujours heureux et qu'en comparant sa destinée à celle des fils de famille qui n'avaient eu besoin, pour arriver, que de se donner la peine de naître, il fut quelquefois tenté de se plaindre des injus- tices du sort ? Gela est probable ; car ce n'est guère qu'à cette date qu'il peut avoir fait contre la bourgeoisie ce fameux serment d'Annibal dont il parlait plus tard, avec sa rhétorique enflammée, aux délégués du Luxembourg. Quoi qu'il en soit, la haine contre la bourgeoisie est, comme onl'a très bien remarqué1, le trait distinctif deM. Louis Blanc.Bien différent d'Aristote, qui voit dans la prépon- dérance des classes moyennes une garantie de liberté et de prospérité pourlesnations.M. LouisBlanclaconsidèrecommeunelèprequi atta- que les peuples aux sources mêmes de la vie et en amène tôt ou tard la décomposition. C'est là unethéorie qui n'est démontrée nulle part, mais qui est partout présente dans les écrits de notre réformateur et qui a exercé parmi nous une influence néfaste. Elle a, en effet, puissamment contribué à diviser des classes faites pour s'unir et pour concourir, chacune à son rang et à sa manière, au bien public : elle a été, pour notre nation, un véritable dissolvant social. L'antipathie de M. Louis Blanc à l'égard de la bourgeoisie l'a conduit à fausser l'histoire et l'économie politique tout ensemble. Cet écrivain distingue, en effet, dans l'histoire moderne, trois grands courants d'idées et de faits qu'il désigne par les trois dénominations à 'autorité, iï individualisme et de fraternité. Ov, si, à ses yeux, le premier est représenté par les anciennes classes dirigeantes, et le troisième par les nouvelles, le second a dans la bourgeoisie sa plus fidèle expression. Mais l'autorité, telle qu'on la concevait au- trefois, perdant tous les jours du terrain, c'est la fraternité et l'in- dividualisme qui se disputent maintenant l'empire du monde 3 . i V. M. Baudrillart, PuUicistes modernes, p. 304, 2 V M. Louis Blanc, Histoire de la Révolution, t. I, p. 7,