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                    UN HUMORISTE LYONNAIS                         263
 et les injures contre ses adversaires ? Victor Cousin, Proudhon,
 Hugo, Eugène Sue, Félix Pyat, Edgar Quinet, les rédacteurs des
 Débats, du Siècle, même du Correspondant, tous y avaient
passé, et sa moindre aménité était de les déclarer bons pour le
bagne. Avec quelle onction il gémissait de ce qu'on n'eût pas
brûlé plus tôt Jean Hus, qu'on eût négligé d'en faire autant à
Luther et qu'il n'y ait jamais eu, disait-il textuellement, un prince
assez pieux pour ouvrir une croisade contre les protestants !
Les écrivains.les plus religieux, le père Gratry, Ozanam, Albert
de Broglie lui semblaient tièdes : Je le crois sans peine ; â côté
d'un pareil allumeur de bûchers, qui ne paraîtrait refroidi? Toute
cette brochure, où je ne regrette que l'emploi de quelques mots
d'une rigueur excessive à l'endroit d'Emile Augier, un des maîtres
les plus sérieux du théâtre contemporain, est juste au fond et
rédigée avec beaucoup de verve.

                                 *


   Longtemps après, en 1866, notre littérateur-architecte, se
jugeant plus malade que de coutume, songea, pour se guérir ou se
 calmer, à se distraire un peu, et la distraction qu'il se donna
consista à improviser un roman. Séduit par l'exemple de la Vie de
 Bohême d'Henri Murger, il voulait peindre les mêmes classes de
la société que lui, mais à Lyon; ce qui, à ses yeux, présentait
une différence notable. Ce court récit, qui n'excède pas deux cents
pages, a été imprimé à Paris, à un très petit nombre d'exem-
plaires, donné à des amis et non mis en vente : il était anonyme
et s'appelait tout simplement : l'Histoire d'André. Il se trouva
que ladite histoire ressemblait fortuitement à celle de Suzanne
par Edouard Ourliac. Au bout de cinq ans, en 1871, l'auteur la
remania et la donna, sous le nom de Clément Durafor, au Salut
public, où nous nous rappelons l'avoir lue avec plaisir en feuil-
letons. Elle se nommait cette fois : Etienne et Mariette : l'action
y était placée à une époque plus ancienne et elle était encadrée
dans un certain nombre de paysages et de tableaux, empruntés au
vieux Lyon. La première esquisse étant devenue à peu près introu-
vable, c'est d'elle que je préfère m'occuper.