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264                  LA R E V U E LYONNAISE
   Je remarquerai tout d'abord que le romancier y visait ou, en
tout cas, y arrivait à produire un effet assez vif, en employant les
moyens les moins compliqués : il avait voulu poser son intrigue
en plein milieu de la vie commune ; enfin, longtemps avant l'appa-
rition ou plutôt avant les'progrès de l'école naturaliste, il avait
puisé aux sources mêmes delà réalité la plus exacte. A la suite de
Balzac, comme Murger, Flaubert, Feydeau, Ghampfleury et Du-
ranty, quand Emile Zola, Vast-Ricouard, Céard, Huysmans,
Hénique, Paul Alexis et autres représentants de la secte nouvelle
étaient encore plongés dans les limbes, il s'était avisé, mais sans
aucun penchant pour la trivialité, sans aucune recherche des
situations scabreuses, sans aucune crudité d'expressions, de prendre
la nature sur le fait, de peindre les hommes tels qu'ils sont, de
raconter les choses comme elles se passent. Rien de plus simple
que le canevas qu'il avait imaginé et l'on aurait eu de la peine à
y découvrir les mille et un ressorts qui constituent la base de la
 plupart des compositions romanesques de notre temps. En voici
 le résumé en quelques lignes.
    A Lyon, vivait la famille Vallier, famille modeste, qui compre
 nait.en outre du père et de la mère, trois fils et deux filles, Adeline
 et Louise : celle-ci, l'aînée, était d'une rare beauté. Le père Vallier,
 qui sous-louait des maisons construites en pisé, aux Brotteaux,
 sur le terrain des Hospices, est ruiné par une des inondations
 du Rhône ; aussi se croit-il trop heureux, en partant pour aller
 chercher fortune à Paris, de pouvoir marier Louise à un ouvrier
 qui demande sa main, et cela au grand regret d'André, ami de la
 maison, qui en gémit tout bas. La jeune femme, qui.est modiste de
 son état, maltraitée par un mari grossier, se sépare de lui, vit
 maigrement du produit de son travail et accepte, en tout bien tout
 honneur, les cadeaux et les secours d'André, qui professe envers
 elle la sympathie la plus vive et la plus pure. Mais tout le monde
 n'a pas son honnêteté et, dans un bal public où l'entraîne une
 compagne d'atelier, Louise fait la rencontre d'un commis, âgé de
 vingt ans, du nom d'Emile; qui la visité, la flatte et peu à peu la
 séduit. Alors, pendant deux années, elle mène une existence assez
 douce, fort singulière, entre cet Emile, qui, à cause d'elle, brave
 la colère de ses parents, et André qui, stoïcien à sa manière, l'aime