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                      ISARRAU DE CRE.MKAUX                                  123
religieuse et déclara vouloir être épouse de Jésus-Christ, marquant,
en toute occasion, les pressants mouvements de son cœur.           '
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    « A peu près dans ce même temps, Mgr de Rebé , archevêque de
Narbonne, son oncle, formait un autre dessein sur sa personne; il
désirait fortement faire le mariage de M1,'8 de •'Capponi avec le fils
de M. le gouverneur de Narbonne ; ilfitun voyage chez M. le comte
de Capponi pour lui en communiquer sa pensée et l'affaire qu'il
avait ménagée; après quoi, il vint rendre visite à sa nièce. Sa
Grandeur fut si charmée de sa sagesse; et de sa beauté, qu'elle ne
put taire qu'elle surpassait extrêmement son attente ; il lui proposa
son dessein, sur lequel elle répondit avec le zèle et la, fermeté où
l'amour de Jésus-Christ règne souverainement, lui faisant entendre
qu'elle ne prétendait plus rien au monde, qu'elle lui avait fait un
éternel adieu ; que, depuis longtemps, elle était engagée par des
liens si forts qu'elle ne voyait rien sur la terre capable de les rom -
pre; qu'elle ne finirait jamais ses jours que dans un monastère de
la Visitation de Sainte-Marie, et qu'elle se promettait que, bien
loin que Sa Grandeur s'y opposât, elle ferait auprès de ses pa-
rents le désir de sa résolution. Mgr de Narbonne prit d'abord
ce zèle et cette ardeur pour un feu naissant que les jeunes
filles forment facilement dans le cloître, mais que la vue du
monde, ou le temps, éteint le plus souvent; il ne parut pas, pour
lors, contraire à ses sentiments; cependant il ordonna a madame
sa mère de la faire sortir et de faire un voyage à Narbonne ; il se
chargea de toutes les dépenses d'un équipage des plus magnifi-
ques ; après quoi, il partit le premier. Dans cet intervalle, Mlla de
Capponi eut la petite vérole ; on ne peut penser avec quelle joie
elle reçut cette maladie, dans l'espérance qu'elle flétrirait cette
beauté dont chacun faisait tant de cas, et que, par là, elle serait à"
couvert d'une si dangereuse épreuve; cette pensée lui fit faire des
tentatives toutes propres à ruiner sa santé, quoiqu'elle n'en voulût
qu'à sa beauté. En l'absence de ses infirmières elle se levait du lit
pour s'exposer à l'air d'une fenêtre, croyant, par là, creuser les
délicatesses de son teint ou en ternir la blancheur, ce qui ne réussit

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    Claude de Rebè, reçu chanoine et comte de Lyon en 1620, mort le 16 mars 1659,
fut archevêque de Narbonne, conseiller et ministre d'État, commandeur de l'ordre,
du Saint-Esprit et président des états généraux de Languedoc.'