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5,46 PHILOSOPHIE. donne aux âmes cette trempe mordante et virile qui développe les nobles personnalités. Le caractère, on l'a dit souvent avec raison, est ce qui manque le plus dans nos sociétés modernes. L'empreinte des âmes est géné- ralement molle et effacée; il leur manque l'eau-forte de» la souffrance. C'est presque exclusivement parmi les hommes de guerre que notre temps a fourni l'exemple de grands caractères, de ces caractères tout d'une pièce qui ne transigent jamais avec l'honneur, et qu'aucune tempête ne fait sombrer. Jadis, les grands caractères étaient beaucoup plus fréquents ; cela tenait à ce fait que tous les hommes d'Etat, à peu d'exceptions près, débutaient dans leur carrière par les armes. Cette rude école était pour eux d'une souveraine efficacité : c'était le Styx dont l'eau les trempait pour le reste de leur vie. Ils en gardaient un reflet sur toutes les phases de leur destinée. C'est sur- tout par les grands hommes de l'antiquité que fut hanté ce vestibule guerrier de la vie; c'est à cette circonstance qu'il faut attribuer à cette époque la fréquence des grands caractères. Et cela se comprend. La sphère de périls, d'initiative, d'émotions, de souffrances, de privations, d'activité où vil l'homme de guerre, développe et grandit merveil- leusement les dons physiques et moraux que la nature lui a départis. Elle donne essor à toutes ses facultés et corrige ses faiblesses; elle bronze les cœurs sans les éteindre; elle mûrit les esprits sans les dessécher; elle affermit les consciences sans les blaser; elle endurcit les corps sans les briser; elle communique à l'être tout