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DES APTITUDES. 501 vaste champ des sciences morales. Le premier, grec d'origine mais lyonnais par adoption spirituelle, précis comme le dogme et simple comme la tradition, est la ferme expression de cette foi soumise mais raisonnable que devait plus tard couronner le martyre ; le second, lyonnais de naissance mais grec et romain de pensées, pénétrant comme l'érudition mais indéterminé comme le rêve, est l'expression calme de ce mysticisme traditionnel autant que doctrinal, qui devait tenter d'élargir les horizons de la science dans les vastes proportions de ceux de la foi. Vous avez déjà nommé Irénée, le glorieux polémiste des choses religieuses, et Ballanche, l'illustre théoricien des choses sociales. J'aimerais à fixer ma pensée devant vous sur ces deux forts esprits, si diversement mais si sincèrement dévoués a la vérité métaphysique, base essentielle de toute science et de tout rapport. Je ferais remarquer la grande influence du premier sur la civilisation de nos pères, et celle du second sur le retour de leurs derniers descendants aux idées reli- gieuses, source de toute sociabilité. Je dirais les savantes discussions de l'un pour sauvegarder les esprits de son temps des aberrations de la Gnose, et les conceptions savantes de l'autre pour rattacher entre elles les générations les plus distantes par les invisibles liens des initiations et des expia- tions sociales. Mais, tandis, il est vrai, qu'à celui-là je n'au- rais à offrir qu'un hommage presque sans réserve pour la vérité si brillamment et si saintement défendue ; à celui-ci, tout en admirant ses nobles pensées dans son noble style, j'oserais exprimer le regret que ses préoccupations logiques des évolutions sociales lui aient fait trop facilement approu- ver les catastrophes qui les accomplissent. Les lois de ces évolutions ne sauraient être, en effet, contre le droit; et Dieu n'a jamais pu vouloir que le progrès fut un outrage à la justice.