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380 LA NOBLESSE EN FRANCE- voir le pied de familiarité sur lequel il vivait avec les plus grands seigneurs du royaume. On admire cette hospitalité sans bornes qui lui est accordée par le maré- chal duc de Luxembourg et sa femme, et celte amitié si vive qui ne leur permet jamais de se retrouver le ma- tin et de se quitter le soir sans un échange d'embrassades pleines d'effusion. Quand le règne du bon et infortuné Louis XVI fut arrivé, cette transformation sociale était à son apogée. Il n'y avait jamais eu et il n'y aura jamais dans le monde une aristocratie aussi exemple de préjugés que celle qui brillait alors. Le progrès des idées était tel, que l'élé- vation du plébéien Necker aux fonctions de ministre, semblait une chose toute naturelle. Dans toutes les grandes villes de France, et notamment à Paris, il y avait une haute bourgeoisie très-inleliigente, très-délicate, très- élégante et très-considérée, qui allait pour ainsi dire de pair avec la noblesse elle-même. La noblesse en était arrivée à ce point où elle trouve sa raison d'existence rationnelle, c'est-cà -dire à être une distinction purement honorifique, et non plus une source de privilèges. Le régime féodal n'avait plus qu'une existence nominale, il était passé presque à l'état de ficlion légale, et la plu- part des privilèges eux-mêmes tombaient en désuétude. Les esprits étaient si bien lancés sur cette pente, que la fameuse nuit du 4 août 1789 ne fut que l'explosion toute naturelle d'une idée mûrie depuis longues années. L'élan irrésistible et spontané qui porta l'ordre entier de la noblesse à sacrifier tous ses privilèges sur l'autel de. la patrie, fut l'application d'un sentiment passé depuis longtemps à l'ordre du jour général. Ce sacrifice était