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MOEURS LITTÉRAIRES. 275 un moment de distraction si facile à concevoir, quand il faut fournir à chaque jour sa lâche écrasante de talent etd'éru- dilion, un jourmiiste vienne à commettre la moindre erreur de date ou de lieu, aussitôt ses confrères tombent sur lui comme une meule: les grossièrclés liennenl lieu d'espril, et les sottises de raisons. Nous avons tous pu lire des polémiques dont le suprême et mutuel argument élait la menace du bâ- ton. J'ai sous les yeux des articles de revue où, b propos de je ne sais quel point douteux d'histoire locale, des épilhètes ri- diculement odieuses sont prodiguées h un adversaire d'opinion: en vérité, il faut avoir un courage héroïque pour s'entendre trailer de la sorle, sans briser la plume avec dégoût, et re- noncer à tout jamais à l'ordenle faligue d'écrire. L'esprit de violence aveugle qui se manifeste dans les ré- gions littéraires a plusieurs causes. Celte balance à faux poids qui nous porte à nous eslimer d'autant plus que nous rabais- sons nos voisins, l'amour-propre est excessif chez ceux qui se livrent à la publicité: delà celle irritabilité dont nous parle le poète latin dans un hémistiche célèbre. Tout écrivain est donc susceptible par nature : son épiderme esl fort sen- sible, le moindre contact l'exaspère, le pli d'une feuille de rose le blesse, c'est une sensilive. — Mais, vis-à -vis de son sem- blable, il croit n'ôlre tenu a aucun égard, il blesse, il déchire : la sensilive se hérisse, et devient buisson. Ce défaut provient encore de l'intolérance, qui a des racines si profondes dans notre pauvre humanité. Voilà bien des an- nées que nous cherchons à extirper cette mauvaise plante : nous nous vantons d'y avoir réussi dans nos inslitulions, el noire siècle porte de nobles devises. Hommes de lettres, vous êtes faits pour marcher en avant du mouvement moral, pour être à l'avant-garde des idées : ne vous (rainez donc pas à la remorque des ergoteurs scholastiques qui se colletaient de par Arislole et Platon. Admettez dans vos rapports mutuelsces principes d'équitable tolérance que vous saluez dans nos