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236 ÉLOGE DE RAVEZ. où les voix se trouvent également divisées, il départage la Chambre comme un arbitre souverain et son vote seul fait h loi. Les règlements de notre monarchie parlementaire s'étaient montrés moins absolus. Toutefois, pour mieux conserver son ascendant sur l'As- semblée, Ravez quittait rarement le fauteuil pour la tribune. Il savait que le président y perd souvent en autorité ce qu'il y gagne en éclat ; les partis acceptent difficilement pour juge l'adversaire de la veille, et la voix qui a pu soulever les passions n'est guère propre h les apaiser. Sans doute cette abstention habituelle de la tribune doit coûter aux libres élans de la parole; elle semble un efface- mentde la personne et presque un surcide de l'orateur, mais la garantie et la durée de l'influence présidentielle sont à ce prix. Cette réserve était d'autant plus opportune que, malgré la prudence de sa conduile, Ravez ne put échapper toujours aux attaques de l'opposition. Quelques-uns, tout en reconnaissant l'impartiale cour- toisie de ses formes, ont voulu rendre le président respon- sable, tantôt des opinions du député, tantôt des décisions de la Chambre. De tels reproches portent certainement l'empreinte des préventions politiques auxquelles les plus sages ne peuvent toujours se soustraire. L'ardeur des luttes rendait difficile cette absorption complète des opinions individuelles du président dans la volonté collec.ive du Corps politique, mais il faut se souvenir que, choisi tout ensemble par la Chambre et par le Roi, le président puisait dans cette double origine le devoir de défendre énergiquement l'inviolabilité de l'un et de l'autre.