Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
                           ÉLOGE DE RAVEZ.                           217
 Ravignan et Lacordaire ont porté la robe d'avocat, et Berryer,
 qui l'honora entre tous , a pu, dans le barreau qui l'entou-
 ra! t k la iête de sa cinquantaine judiciaire, retrouver un
 grand nombre'des orateurs politiques de la France.
    Mais on peut dire que.de 1795 a 1820, le barreau ne dé-
 ploya nulle part plus de richesses qu'a Bordeaux. On vit dans
 cette métropole de l'antique Aquitaine, le sceptre de la parole
 disputé tour a tour par Martignac père, Jaubert, Ferrère,
Barennes, deSaget, Laine, Ravez, de Peyronnet, Martignac,
 et toute cette célèbre pléiade qui faisait dire a Louis XVIII,
si épris de toutes les gloires de l'intelligence : « Si je n'étais
 « roi de France, je voudrais être avocat a Bordeaux (1). »
    Ravez plus jeune que les'uns, plus ancien que les autres,
eut a se mesurer successivement avec tous. S'il fut donné
à quelques-uns de l'atteindre, nul ne le dépassa.
    Chacun, dans cet éclatant foyer, brillait par des rayons
divers. Ferrère avait l'inspiration poétique et l'entraînement
oratoire, Laine, les traits de génie, Peyronnet, la véhémence,
Martignac, l'insinuation jet la grâce ; Ravez prit pour lui
la science et la force. Il avait, dans les laborieuses médi-
tations de la retraite, étudié le droit a ses sources les
plus fécondes ; il possédait, comme nos anciens modèles,
les trésors de cette législation romaine qui est restée la
mère de toutes les législations civilisées, comme l'église
romaine est la mère de toutes les églises chrétiennes. Sa
science toutefois n'était ni minutieuse, ni aride; la hauteur
des vues répondait à la profondeur des recherches. Il inter-
rogeait le législateur dans sa plus intime pensée, et on


   (1) Cette renommée s'est perpétuée par de dignes héritiers, et de nos
jours encore Bordeaux a donné à la Tribune, comme à la Barre cl à l'Aca-
démie française, le puissant orateur qui vient de succéder à l'un de nos
éloquents compatriotes, comme bâtonnier de l'ordre des avocats de Paris.