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184 ORFÈVRERIE. quemment représentée. Tout l'exprime ; et les anges pros- ternés sur la base forte et élégamment ornée de l'ostensoir et qui rappellent l'adoration terrestre, et ces colombes , symboles des âmes contemplatives, placées sur le nœud, comme pour relier l'extase de la terre avec celle du ciel; par l'agitation de leurs ailes et leur élancement vers la sainte Hostie, elles manifestent le brûlant désir de pos- séder Dieu. Et ces huit anges plus petits, disposés autour du disque, et qui remplissent envers le Dieu caché leurs célestes fonctions : ils adorent, ils louent, ils contemplent, ils supplient pour les humains ; ils chantent le cantique sans fin autour du trône de l'Agneau. Leurs attitudes se ressemblent à de petites nuances près. C'est que dans l'éternité, l'âme qui possède Dieu est absorbée dans un seul sentiment ; aux passions terrestres, la multiplicité ; mais au transport séraphique, l'unité d'une même parole ; parole que l'amour trouve toujours nouvelle, quoiqu'il la redise toujours. L'effet de cet ostensoir est merveilleux; de près comme de loin il résiste à toute critique ; s'il n'obtient pas l'effet lumineux par les rayons traditionnels, il atteint ce résultat par des entrelacements d'arabesques que dépassent quel- ques rares tiges d'épis, et qui présentent à l'œil une masse de lumière plus compacte et plus également soutenue que celle des gloires ordinaires. Les détails d'exécution répondent à l'idée dont l'artiste s'est inspiré; les ornements perlés, les rinceaux de vigne et les jets de blé d'une pureté irréprochable, l'union par- faite de la rosace avec la tige qui en sort comme un épanouissement naturel, la disposition harmonieuse des émaux et des pierreries, tout cela contribue à faire de ce meuble sacré, selon l'expression de M. Violet-Leduc, une merveille que l'on peut regarder comme le poème de l'Eucharistie. La pensée en est due à notre illustre architecte, M-. Bossan. Il l'a esquissée avec cette inspiration reli- gieuse dont il a le secret, et l'orfèvre l'a si bien traduite que M. Bossan lui-même, en la considérant pour la pre- mière fois, n'a pu s'empêcher de dire qu'il n'avait jamais