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FONVILLE. 463 la voient, car si la nature est un livre perpétuellement ou- vert sous les yeux de tous, tous n'y lisent pas de la même manière, et combien peu, hélas ! y découvrent les ensei- gnements de Dieu. Fonville, quoique artiste, et voyant, nous aimons à le croire, autrement que le vulgaire, s'habi- tua à ne montrer la campagne que sous son jour le plus ordinaire. Son genre fut le paysage portrait. Il le peignit en réaliste, mais en réaliste de bon goût ; il ne s'arrêta pas, comme les fanatiques de cette école, devant un tas.... ré- pugnant ; il ne peignit pas une Suzanne au bain avec les ge- noux sales ; il sut choisir ses sujets toujours gracieux, co- quets, lumineux. Les roches chauves, les profondes crevasses, les torrents débordés bondissant de roc en roc, les arbres brisés par la tempête; tous ces spectacles imposants d'une nature tour- mentée, n'eurent pas le don d'attirer son pinceau, il préféra les frais ombrages, les petits ruisseaux murmurant tout bas leur musique harmonieuse à travers les roches moussues, les prairies en fleurs, la gaie maisonnette se cachant comme une jeune pensionnaire en vacances, derrière sa touffe de lilas. Il répéta après Boileau : J'aime mieux un ruisseau qui, sur la molle arène, Dans un pré plein de fleurs lentement se promène, Qu'un torrent débordé qui, d'un cours orageux, Roule plein de gravier sur un terrain fangeux. Fonville traita tous les sujets qu'il choisit avec un talent réel; son pinceau gracieux, élégant et facile, reproduisait aussi fidèlement que possible la nature devant laquelle il était placé, sans recourir aux petits moyens de ce que nos artistes appellent les ficelles du métier. A une grande légèreté, sou- vent hardie, de crayon, il joignait une composition aisée, et l'heureuse harmonie de son dessin et de sa couleur, était