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242 ÉLOGE DE RAVEZ. Cependant, le mouvement électoral qui avait porté Marti- gnac au -pouvoir avait appelé Royer-Gollard a remplacer Ravez dans la présidence de la Chambre. L'histoire fera sans doute un jour le parallèle de ces deux hommes célè- bres, si dignes l'un et l'autre de continuer la chaîne des illus- trations nationales que la Chambre avait placées à sa tête. Royer-Collard était plus philosophe, Ravez plus législateur; le premier excellait à exposer les principes, le second à diriger les hommes ; Royer-Collard imposait davantage aux attaques, Ravez s'en défendait mieux ; l'un avait plus d'au- torité, l'autre plus d'influence. Ravez, sur les bancs de la Chambre, donna l'exemple de la déférence envers son successeur. De tels hommes ne se refusent jamais une mutuelle justice. Redevenu simple député, Ravez se fit remarquer par sa réserve et son indépendance. L'une était la loi de sa posi- tion, l'autre appartint toujours a son caractère. Au milieu des débats engagés entre l'ancienne majorité et la nouvelle, au lieu de passionner la discussion, il fit entendre à tous des avertissements salutaires. Personne ne sut mieux montrer à la Chambre le danger d'abuser de sa force, et l'émotion fut grande quand une si haute expérience laissa tomber de la tri- bune ces belles paroles, si dignes d'être méditées par tous les pouvoirs : « Ne mesurons pas nos devoirs par notre » puissance, mais notre puissance par nos devoirs » (1). Son attitude témoigna bien plus de sollicitude pour la Monarchie que d'hostilité contre le Cabinet. C'était la véri- table opposition de l'homme d'État qui respecte toujours dans le pouvoir qu'il n'a plus, celui qu'il exerça la veille, et celui que le pays peut l'appeler h reprendre le lendemain. (1) Moniteur du 13 février 1828.