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186 ORFÈVRERIE. De là , nécessité de fixer des limites, de poser des princi- pes sûrs, mais exclusifs en apparence pour ceux qui ne soupçonnaient pas les raisons de les établir. Cette législation a été formulée par des hommes d'un savoir incontesté, et c'est à eux que nous devons d'avoir été remis dans les bonnes traditions du style ogival. Mais après avoir donné la raison de cette intervention légitime et sage, si nous envisageons, par un coup-d'œil large et élevé, le style gothique en lui-même, et dans son principe générateur, nous reconnaîtrons qu'on ne peut justement lui reprocher la contrainte, l'immobilité et la monotonie. Bien loin d'étouffer l'inspiration, nous pro- clamerons bien haut, à la gloire du dogme catholique,, que le style ogival, c'est la variété presque infinie des détails dans l'unité grandiose de l'ensemble; c'est le mouve- ment, la liberté, la vie. L'architecture grecque est bien loin d'avoir autant de variété et d'indépendance. Ses profils sont très-purs, ses proportions exactes, ses formes irréprochables Mais ce style se répète toujours, il n'innove rien, il impose des règles absolues. Le souffle créateur se trouve resserré dans des données inflexibles. C'est simple, c'est rationnel, c'est beau, mais ce n'est pas infini, mais on ne sent pas sous ses frontons et ses portiques cette témérité, d'un vol inspiré, même dans ses écarts, et qui va saisir l'idéal dans les hauteurs des deux. C'est la divinité, mais telle que des hommes la peuvent concevoir, laissant encore une certaine paix aux sens et aux passions, permettant à la nature un peu de bonheur terrestre. Dans le temple grec, l'homme rend à la Divinité un certain culte, mais il y reste possesseur de sa libre raison eï, de ses idées. II n'est pas anéanti et divinisé tout à la fois, renversé par terre et élevé au-dessus de lui-même, opprimé sous le poids de la majesté et transporté en même temps dans les hauteurs de l'extase et dans les enivrements de l'amour. Au christianisme devait appartenir cette belle gloire de surpasser autant dans ses édifices les monuments païens, que ses doctrines surpassaient les fausses reli-