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                REVUE DE FOURVIÈRE POUR 1857.                     303

 fournit une nuance rouge sombre, et lorsque nous voulons du
 vermillon, nous l'obtenons en combinant artificiellement en-
 semble le mercure et le souffre, ce qui donne un résultat exempt
d'impuretés. Cette couleur d'un haut prix était en grande estime.
Le minerai provenait d'Espagne; on l'apportait brut, et il n'était
permis qu'à Rome de lui faire subir les diverses préparations qui
le rendraient propre à la peinture. L'état en avait le monopole,
il enfixaitla valeur, et en affermait les revenus à une compagnie,
qui faisait souvent de très-gros bénéfices, en sophistiquant cette
substance. Les fragments que nous ramassons, ou même que
nous trouvons en place sur la surface des murailles, comme
dans le cas présent, sont ordinairement excessivement altérés.
Cette peinture, en l'état normal, avait un aspect brillant fort agréa-
ble à l'œil. Je n'en ai jamais trouvé qu'un seul petit morceau ,
ayant conservé son éclat primitif.
   Voici comment on obtenait ce brillant : lorsque le mur était
parfaitement poli et la peinture bien sèche, on y passait, avec un
pinceau, un mélange chauffé de cire blanche et d'huile. On ap-
prochait de très-près un appareil de fer, rempli de charbons
ardents, et lorsque la cire commençait à suinter, on frottait avec
des linges propres. J'ai expérimenté l'excellence de ce procédé,
décrit par Vitruve —VII, 9. — et j'ai parfaitement réussi à revivi-
fier des fragments, dont la couleur était fortement oblitérée. L'eau
servait de véhicule au cinabre réduit en poudre. Comme il coû-
tait fort cher et que de sa nature il est très-lourd, les peintres
trempaient très-souvent leurs pinceaux dans l'eau. Il résultait
de cette opération que le sulfure de mercure se précipitait au
fond du vase, et les ouvriers infidèles le recueillaient, après leur
travail.
   Dans les temps primitifs de Rome, le cinabre s'employait pour
les cérémonies sacrées. Les jours de fête, on en peignait la tête
de Jupiter; on prétend même que lorsque Camille triompha, il
s'en passa une couche sur le corps. Il serait curieux de recher-
cher quel effet ce liniment devait produire dans les organes de
ceux qui s'y soumettaient. Les Romains connaissaient très-bien
les propriétés délétères de ce composé mercurielj car les ou-