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EXPOSITION DES BEAUX-ARTS. 331 le plus difficile se complaît délicieusement en admirant ces deux têtes d'une finesse et d'un fini dans le trait au-dessus des plus grandes et des plus chaleureuses félicitations. Nous n'avons pas à tenir compte à M. Flandriu de la rareté de ses toiles à la présente exposition ; ses fresques à Nîmes et à Lyon lui ont à peine donner le temps de terminer ces deux précieux tableaux. M. Paul Flandrin supplée cette fois par ses prodigalités à la réserve forcée de son frère. Elève de M. Ingres, il y a chez lui, dans sa manière, du Poussin véritable. Dans ses compositions l'homme domine avec toute sa virilité, sa force, sa valeur, son intelligence, sur tous les êtres inférieurs. C'est bien là le roi de la création. La toile la plus importante, (car toutes sont très-re- marquables), est Jésus et la Chananéenne, tableau d'une dimen- sion assez développée. La scène est savamment disposée. Les bords du Rhône, paysage presque microscopique, est étudié avec un soin infini. Pas une feuille ne manque à ces beaux arbres sous lesquels nous voudrions souvent pouvoir venir rêver. Les feuilles de ce chêne centenaire soupirent sous le souffle tiède de la brise ; il y a de la chaleur dans la peinture, le fond du tableau est assez remarquable comme perspective. Les couleurs de l'ensemble sont combinées avec beaucoup d'art. On voit que l'artiste est passé maître. Pour nous résumer et exprimer ce que nous pensons touchant M. P. Flandrin, nous dirons que comme le Poussin dont il suit les traces, il semble vouloir mériter le titre de peintre des gens d'esprit. Sans jamais viser à l'effet il produit une profonde im- pression sur tous ceux qui l'étudient. Etudier M. Flandrin, c'est ne pas être loin de l'admirer. Fernand LAGARRIGUE. La suite au prochain numéro.