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84 LE PREMIER PUITS ARTÉSIEN permet ja peine de prêter une oreille distraite à la voix des poètes. On dit, que ne dit-on pas ! que le temple est désert, et que D'adorateurs zélés à peine un petit nombre Ose des premiers temps nous retracer quelque ombre, Le reste pour son Dieu montre un oubli fatal, Ou môme, «'empressant aux autels de Baal, Se fait initier à ses honteux mystères. Voila ce dont on se plaint ou ce dont on nous menace* Hâ- tons-nous, Messieurs, d'ajouter que nous avons entendu trop souvent de ces prophéties sinistres, œuvre d'esprits chagrins ou injustes, pour en être bien effrayés. Jusqu'ici le danger a été chimérique, la menace impuissante. Nous en attestons ces contemporains illustres, dont le lyrisme nous a bercés, et que nous* avons payés peut-être de plus d'admiration et de renommée que leurs devanciers n'en eurent en aucun temps. Nous en attesterions au besoin des noms que nous n'aurions pas a chercher bien loin. Notre siècle n'est encore qu'à la moitié de sa course ; sa pléiade poétique est déjà brillante, et nous devons nous rendre ce témoignage que toutes les voix inspirées ont trouvé parmi nous un facile écho; que notre société, livrée aux sciences et a l'industrie, ne s'est pas laissée pour cela entraîner a la pente du matérialisme, qu'elle n'a pas cessé d'aimer tout ce ce qui est élevé, tout ce qui est noble, tout ce qui est beau, tout ce qui lui paraît porter un signe ou même un reflet de génie. Nous avons encore en France cette vertu qu'un fauteuil a l'Académie française, chez nous, est la plus recherchée de toutes les distinctions, et celle que le sentiment public place le plus haut. Pourquoi n'en serait-il pas toujours ainsi? pourquoi se- rions-nous exposés à voir le flambeau sacré non pas s'étein- dre, car la poésie est immortelle, mais s'affaiblir et pâlir aux