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                      LE PÈRE DE LA CHA1ZE.                          143
calvinistes qui reproche sur ce sujet le plus aigrement à l'Eglise
romaine la cruauté de sa doctrine, en demeure d'accord dans le
fond, puisqu'il permet l'exercice de la puissance du glaive
dans les matières de la religion et de la conscience : chose aussi
qui ne peut être révoquée en doute sans énerver et comme es-
tropier la puissance publique            En un mot, le droit est
certain, mais la modération n'en est pas moins nécessaire. » (1)
   Cette doctrine fut généralement admise par l'Eglise ; elle eut
pour elle de très-grands saints, tels que saint Augustin et saint
Bernard. Mais elle ne s'appliquait qu'aux hérétiques et non aux
païens contre lesquels l'Eglise ne se reconnut jamais le droit de
faire appel au bras séculier. Jamais non plus la doctrine de la
coercition ne fut admise par elle que dans certaines limites, et
jamais elle ne pensa que les princes, pour cause d'hérésie,
pussent appliquer la peine de mort.
   Lorsque les chefs protestants mirent en pratique cette doc-
trine , ils ne lui donnèrent aucune borne. On sait comment
Calvin, qui niait l'infaillibilité de l'Eglise, fit brûler Michel
Servet, et trancher la tête à Jacques Bruet et à Valentin Gentilis,
pour avoir nié sa propre infaillibilité.
   Calvin voulait que les Anabaptistes fussent traités comme des
brigands.
  Suivant Théodore de Bèze, la liberté de conscience était une
idée diabolique, Sainte-Aldegonde, un des chefs les plus ardents
du protestantisme, écrivait, le 10 janvier 1866, à ce même
Théodore de Bèze : « qu'il trouvoit fort étrange qu'il y eût encore
des hommes si tendres de cœur qui mettent en dispute si le ma-
gistrat doit mettre la main à punir par extérieure et corporelle
punition et amendes, l'insolence commise au service de Dieu et
de la foi. »
   Flaccus Illiricus, le centuriateur de Magdebourg, ne cessait de
s'écrier : que plutôt que de souffrir un surplis, il fallait dévaster

   (1) Bossuct. Hist. des Var., 2 e édition, 1691, in-12, Paris, Desprez,
t. ni, p. 90 et suir.