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                   DE GRIMOD DE LA REYNIÈRE.                    323

 rendre ma réponse plus intéressante , vu que je croyois pouvoir
 rompre enfin ma retraite et me mettre au courant de nos nou-
 velles dramatiques. Mais je vous avoue que les événements des
 premiers jours de prairial m'ont effrayé et m'ont fait perdre l'en-
 vie, d'ailleurs assez modérée, de rompre ma solitude. Si chacun
 suivoit à peu près le même sistème on ne sortiroit que po.ur ses
 affaires , le monde seroit plus tranquille et nous n'aurions pas
 éprouvé les secousses qui depuis six ans se sont succédées avec
 tant de rapidité. Cette dernière, comme vous l'avez vu par les
 papiers publics, a été des plus terribles et la représentation na-
 tionale s'est vue à deux doigts de sa perte, ce qui eut été pour
 nous le plus grand des malheurs, car l'anarchie et le pillage s'en
 seroient suivis, comme on peut le juger par l'esprit des préten-
 dus décrets rendus dans cette nuit désastreuse, lorsque l'Assem-
 blée était sous le couteau des assassins. Grâce au Ciel, tout est
 tranquille maintenant. Dieu veuille que cela dure et que les bons
citoyens conservent l'empire qu'ils on su reprendre avec tant de
courage et d'énergie. Je vous remercie bien sincèrement de
l'obligeant intérêt, que vous continuez de prendre, au succès de
mes affaires personnelles. Malgré le bon esprit qui dirige l'Assem-
blée vous avez du voir par les exceptions et entraves dont on a
chargé le dernier décret sur la restitution des biens des condam-
nés, qu'on est bien lent à faire justice et qu'on a l'air de ne s'y
déterminer qu'à regret. Au reste, la levée du séquestre mis sur
les biens des fermiers-généraux dépend de l'apurement d'un
compte dont on dit qu'on s'occupe depuis sept à huit mois et du
quel il résultera clairement (ce qu'on savoit très-bien même en
les envoyant à l'echafaud) que loin de devoir à la nation ils en
sont créanciers de plus de 45,000,000 fr
   Le plus petit ménage de Paris est en ce moment d'un prix si
excessif qu'en ne dépensant que 60 ou 89 livres par jour on est
sur de mourir de faim. Croiriez-vous qu'une laitue coûte 20 à
2b 1., le sucre 29 à 30 1., la viande 8 à 9 I., l'huile d'olive 20 à
28 1., et le reste à proportion. Le pain s'est vendu jusqu'à 23 f.
la livre. Cela fait frémir mais cela n'est pas moins réel.
   Vous savez qu'en vertu d'un décret, les membres de la Com-