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322                     LETTRES INÉDITES
Les mouvements qui ont eu lieu ici le 12 germinal, dont vous avez
vu les détails dans les gazettes , n'ont amené aucune suite fâ-
cheuse ; les bonnes dispositions du général Pichegru et le courage
qu'a déployé la Convention ont prévenu tous les malheurs. De-
puis la réclusion des factieux, l'assemblée est calme et s'occupe
sans distraction du bonheur public. La paix avec la Prusse est
d'un heureux présage. Malgré la cherté du pain et le prix exces-
sif des denrées, le peuple est calme : on a envoyé une force
armée autour de Paris pour protéger les convois de farines qu'on
arrête de toutes parts, sans cela le pain ne manquerait pas, il y a
beaucoup de grain dans les campagnes. C'est la malveillance et
le défaut de confiance des paysans dans les assignats qui font
la disette.
   On a donné hier au théâtre de la république la 2e représen-
tation d'Abufar ou la famille arabe, tragédie de M. Ducis qui
etoit tombée à la première et qui s'est relevée avec succès. Il
paroit cependant que cet ouvrage où l'auteur a volé de ses pro-
pres ailes est fort inférieur à ses autres ouvrages imités de Sha-
kespeare ou de Sophocle. Baptiste est venu dire que la pièce
étoit du citoyen Dueis, auteur à'OEdipe à Colone ! Concevez-
vous une pareille bévue de la part d'un comédien V Mais avec le
public qui fréquente aujourd'hui les spectacles on peut tout se
permettre, et n'y regarder pas de si près. Enfin M. Ducis a paru
lui même en personne.

11 ne paroit point de nouveautés vu la cherté du papier et de
l'impression ; mais les anciens et beaux ouvrages sont hors de
prix, tel qui valoit 2 louis coûte 800 1.
                                    Salut et fraternité,
                                                GRIMOD.
                           IVe LETTRE.
                        Paris, 8 juin 1795, — 20 prairial, an III.

  J'ai reçu dans son temps, Monsieur, avec le plaisir qui accom-
pagne toujours tout ce qui me vient de vous , votre lettre du
18 floréal. J'ai tardé d'y répondre dans l'espérance de pouvoir