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                      LE PÈRE DE LA CHAIZE.                          289
et de même que son Grand dictionnaire historique engendra le
Contrat social et l'Encyclopédie, de même la révolution française
fut portée tout entière dans les flancs de VEncyclopédie et du Con-
trat social. Que les contemporains de l'auteur des Variations, que
le clergé de France, que Louis XIV et ses ministres aient compris
toute l'étendue du mal qui menaçait dans l'avenir la religion ca-
tholique et la royauté, c'est ce qu'il serait puéril de nier quand
on se rend suffisamment compte de l'état des choses et des esprits
à cette époque. Si la révolution anglaise de 1688, que préparait
sourdement le protestantisme, n'avait point encore fait explosion,
on n'avait pas oublié la république anarchique de 1648 et le drame
sanglant de Whitehall; on n'ignorait pas ce que la réforme renfer-
mait de périls pour l'autel et pour les puissances légitimes.
   A peu d'exceptions près, les Français du XVII e siècle étaient
sincèrement religieux; ils ne pouvaient entendre sans indignation
les violentes et perpétuelles attaques auxquelles le catholicisme
était en butte. Sous toutes les formes et par tous les moyens, les
protestants faisaient en faveur de leurs opinions politiques et reli-
gieuses, une propagande des plus actives. Les écrits les plus dan-
gereux, les plus immondes libelles contre Rome et le clergé
catholique, étaient vomis avec une infatigable activité par les
presses d'Angleterre et de Hollande (1).
   Cette guerre sourde, anonyme, déloyale et sans trêve, avait
fini par répandre dans les esprits une vague terreur. On craignait,
non sans fondement, et dans un temps plus ou moins éloigné, le
retour de ces guerres intestines qui, pendant plus d'un demi
siècle, avaient déchiré l'Europe.Instruite par les cruelles leçons du
passé, la France se reposait, confiante et paisible, sous le glorieux
sceptre de Louis XIV. C'est qu'alors elle vouait à la monarchie,
si fièrement et si noblement représentée, si bien identifiée avec
ses tendance et ses vœux, une sorte de culte passionné jusqu'à
l'idolâtrie. Après tant d'orages et de ruines amoncelées, menacée

   (1) Voir Brunet, Manuel du libraire, etc. qui pourtant ne donne qu'une
liste très-incomplèle des ouvrages et des pamphlets des protestants contre
les catholiques et contre Louis XIV et ses ministres.
                                                           1!)