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2!)0 LE PÈRE DE LA CHA1ZE. tant de fois, vers la fin du dernier siècle, de devenir la proie de l'étranger, elle s'était éprise d'un amour et d'une admiration sans bornes pour cette forte race de Bourbon qui , après l'avoir tirée de l'abîme, avait, en moins d'un siècle, calmé ses discordes, cica- trisé toutes ses plaies, assuré sa prospérité intérieure, amélioré ses lois, étudié ses besoins sociaux, protégé son commerce et son agriculture, ajouté à son territoire de riches provinces et d'im- menses colonies, élevé sa marine à un degré de puissance inconnu jusqu'alors, organisé ses finances et son armée sur des bases plus larges, raffermi d'une manière inébranlable sa nationalité, assuré enfin sa prépondérance définitive en Europe. La France trouvait dans l'unité et l'hérédité du pouvoir la meilleure des garanties pour son repos, son progrès et ses libertés ; et de même qu'elle n'avait cessé autrefois d'étayer de tous ses efforts l'unité royale luttant contre l'anarchie féodale, de même au XVIIe siècle, afin de détruire l'anarchie des administrations provinciales,elle favori- sait le travail efficace quoique lent de la royauté qui s'appliquait à fonder peu à peu l'unité administrative (1), et, pour se garantir de l'anarchie protestante, elle voulait à tout prix reconquérir l'unité religieuse. Mieux qu'aujourd'hui, on était alors pénétré de cette vérité que s'il peut être permis de discuter des articles de foi, des questions fondamentales en matière dogmatique, à plus forte raison ce droit peut-il être exercé lorsqu'il s'agit des lois positives et transitoires de la société. Les causes de la Révocation ne furent donc pas moins religieuses que politiques. La religion comme la monarchie se trouvaient également intéressées à reconquérir la position qu'elles avaient perdue. Depuis longues années, le clergé s'appuyant sur l'usage à peu près constant de l'Eglise et sur les vœux nettement dessinés de l'opinion, demandait, dans ses assemblées quinquennales, que les privilèges des protestants fussent supprimés,leurs temples démolis (1) Pour s'assurer de ce point important et si peu connu jusqu'à noire époque, le lecteur peut consulter l'ouvrage de M. de Toquevillc, qui a pour litre : L'Ancien Régime et ta Révolution, in-8. Michel Lévy, l s 5 6 , 2e éd.