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248                        BIBLIOGRAPHIE.

 en a ordinairement égalé la concision, atteint l'énergie. Peut-être
l'a-t-il serré quelquefois de trop près. On est disposé aujourd'hui à
substituer aux traductions un calque pur de l'original. De même
que, dans les arts du dessin, les procédés matériels les plus exacts
ne peuvent rendre la vérité d'une figure , parce qu'ils ne repro-
duisent pas le rayonnement de l'âme, de même les tours d'une
langue ne peuvent rendre absolument ceux d'une autre ; on ob-
tient ainsi la ressemblance matérielle bien plus que celle de la
vie elle-même et M. Olivier, qui est loin d'avoir donné dans le
faux système où Chateaubriand et Lamennais ont échoué, a par-
fois et à tort, selon moi, un peu trop de scrupules de fidélité.
Je ne parle pas de l'impropriété de certains termes ; ce sont des
taches rares et légères. En général le style de cette traduc-
tion a de la netteté, de la force et de la couleur ; il donne une
juste idée de son modèle ; c'est la gravure bien faite d'un ma-
gnifique tableau. Si j'ai à exprimer un regret, dût mon opinion
n'être pas partagée de tout le monde, c'est que le traducteur se
soit interdit systématiquement toute espèce de notes : les notes
 sont une chose dont on a souvent abusé, et qui dépare bon
nombre d'ouvrages ; mais il y en avait ici de nécessaires, car
les textes anciens ont des obscurités que ne dissipent pas toujours
les obscurités égales de la traduction ; en même temps , il est
difficile que la lutte du traducteur contre un modèle dont il
s'assimile la pensée, ne lui suggère pas des observations intéres-
santes, et dont le lecteur doit faire son profit. Les anciens, et
Tacite au premier rang, ont souvent plus besoin de commen-
taires que de traductions. C'est beaucoup d'aider à les lire : ne
faut-il pas aussi aider à les méditer?
                                    C. DARESTE DE LA CHAVANNE.


FEUILLES D'AVRIL,   poésies par Pierre BARBIER, Paris, 1857, in-12.
   Doit-on la vérité aux grands ? et par ce mot nous entendons
tout ce qui s'élève au-dessus du vulgaire. La question est sé-
rieuse. A l'envers de la galanterie, on voit de grands préceptes
pour et de plus grands exemples contre. Une réponse négative
mise en pratique apporterait d'immenses troubles dans le monde,
affirmative elle révolutionnerait l'humanité.
   Parmi les grands, les plus chatouilleux sont certainement les
dames et les poètes, et qui prendrait fantaisie de leur présenter
la vérité sans ornements s'exposerait parfois à être traité à la
façon de Lolla-Montès par les unes, et par les autres comme les
malheureux critiques de M. Barbier que le poète écrase dès
l'abord de tout le poids de son indignation, même avant de sa-
voir l'accueil que recevront ses vers. Pauvres critiques ! leur
position est difficile ; lequel, en effet, d'entre eux oserait pré-
senter désormais des observations tant soit peu loyales et sin-