page suivante »
LE PÈRE DE LA CHA1ZE. 189 cence dans la propagation des doctrines antisociales que la ré- forme portait dans son sein, n'est-il pas hors de doute que ces doctrines avaient été répandues longtemps auparavant? Pour s'en convaincre, il suffit de jeter les yeux sur l'Histoire des varia- tions. Si Bossuet n'en eût pas d'abord compris la dangereuse portée, on s'expliquerait difficilement qu'il eût pris tant de peine à les combattre. Depuis longues années, la Hollande et les autres Etats protestants inondaient l'Europe d'ouvrages et de pam- phlets où les principes fondamentaux de la société étaient inces- samment battus en brèche. Depuis la tentative des Anabaptistes pour réformer, dans sa base, la société civile, jusqu'aux fré- nétiques prédications de Jurieu, tout ce qu'il y a de plus saint et de plus inviolable parmi les hommes n'avait-il pas été mis en question? Le droit d'insurrection contre les princes n'avait- il pas été solennellement proclamé dans les écrits des protes- tants, dans leurs synodes, et par la voix même de leurs mi- nistres? (1) L'indissoluble union du mariage, l'autorité pater- nelle elle-même n'avaient-elles pas été mises en question avec une effrayante audace de langage? (2) N'avait-on pas entendu prêcher le dogme de la souveraineté du peuple et le poignard des régicides n'avait-il pas trouvé des apologistes ? « A cette eon- (1 )Voir l'Hist. des Variations, 2 e édition, t. III, p. 49 et suiv. p. 61 et sui. Bossuet a cité les preuves authentiques de cette grave accusation. Il avait découvert ces doctrines dans les synodes nationaux et provinciaux des protestants, dans les registres publics de leurs assemblées , dans leurs histo- riens, tels que Th. de Bèze, d'Aubigne et autres. Aucun protestant, si l'on en excepte Jurieu, n'osa démentir Bossuet. Bossuet. Hist. des variât, t. III, 2" éd., p. 283. (2) « Envisageant à la fois la question sous le point de vue religieux, po- litique et civil, Bossuet démontrait que la Reforme attaquait dans leurs fon- dements établis par J. C. même, l'union des familles, en détruisant la sain- teté et la concorde du mariage, et le repos des empires, en autorisant la ré- volte contre les rois. A ce sujet, il comparait la fidélité inviolable des pre- miers chrétiens sous la persécution des Empereurs , avec les terribles ré- voltes de la Réforme.» (Duc de Noailles. Hist, de madame de Maintenait, t. Il, p. 506).