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140                   LE PÈRE DE LA CHAIZE.
failli à cette tâche. Nous avons fui avec le même soin et la
voie qui nous eût conduit à une apologie systématique et celle
qui eût abouti à une condamnation aveugle. Nous dépouillant de
nos idées actuelles sur la liberté des cultes et la liberté de
conscience, nous avons voulu examiner cette question sous le
même aspect que les contemporains. C'était le seul moyen de la
présenter telle qu'elle doit l'être. « Il faut, a dit le cardinal de
Bausset, consentir à se transporter dans le siècle dont on lit
l'histoire, avec l'esprit, les principes et les préjugés même qui
dominaient à cette époque ; sans cette disposition équitable, que
tout historien a sans doute le droit de demander, et l'espérance
d'obtenir, on lui prêterait très-injustement des sentiments et
des principes aussi étrangers à son cœur qu'à sa pensée. » (1)
   Louis XIV a-t-il inauguré en Europe, ainsi que le prétendent
les protestants, l'intolérance civile? Quelles causes faut-il assi-
gner à la révocation de l'Edit de Nantes ? Ces causes furent-elles
politiques autant que religieuses? Quels furent les promoteurs
de cette mesure? De quelle manière fut préparée la Révocation?
Quelles en furent les conséquences au point de vue religieux,
politique, économique et social?
   A ces diverses questions se rattachent des considérations d'un
ordre secondaire qui trouveront naturellement leur place dans la
discussion rapide des faits. Il nous a paru inutile de parler du
protestantisme au point de vue dogmatique, et superflu de faire
l'historique complet de l'Edit de Nantes jusqu'au moment de sa
suppression.
   Les livres ne manquent pas où ces deux questions ont été
traitées avec toute l'autorité de la science, du talent et du génie.
Après Bossuet surtout, on ne peut que garder un respectueux
silence mêlé d'admiration. Mais depuis Bossuet, nous avons vu
se développer ces fruits empoisonnés dont son œil d'aigle avait
découvert les premiers germes. C'est donc, en première ligne, au
point de vue social et politique, qu'il nous a semblé opportun de
jeter un coup d'oeil rétrospectif sur le protestantisme. De lui


  (1) Vie de Bossuet, t. 4, p. 48.