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DANS LE SAHARA. 87 tour à tour, sur un théâtre d'une originalité si émouvante, les souvenirs et les ruines de tant de civilisations, la vie nomade avec sa grandeur et ses misères encore plus frap- pantes, les travaux de nos armées, mêlés de tant de hasards et de fatigues noblement supportées , la force qui dompte mise au service de l'intelligence qui civilise, les Arabes avouant, après une noble lutte, notre irrésistible supériorité, la paix régnant aujourd'hui, là où les tribus étaient toujours en guerre , le drapeau français arboré jusque sur les places les plus éloignées, et, pour couronner une telle œuvre, l'es- poir, si ce n'est encore qu'un espoir, de voir un jour la croix relevée sur une terre qui fut chrétienne il y a quinze siècles. Voilà , Messieurs, un riche cadre de pensées ; voilà la source féconde, inépuisable; et nous aussi, en adressant un appel poétique aux concurrents qui l'ont entendu, nous avons espéré être assez heureux pour faire jaillir l'eau du rocher. La conquête de l'Algérie sera certainement la plus grande chose que la France aura faite en ce siècle. Nous y voyons réunis tous les caractères des événements qui frappent l'esprit des peuples, et laissent plus tard une longue trace dans leurs souvenirs. Aujourd'hui, après bientôt vingt-sept ans, nous pouvons reconnaître et embrasser, d'une seule vue, cette marche assurée et progressive, qui a conduit les armées françaises de la rade de Sidi Ferrouck aux montagnes de la Kabylie ou aux limites mêmes du grand désert; marche que n'ont arrêtée ni les révolutions de la mère patrie, ni les ré- sistances, désormais brisées, de l'islamisme, ni les obstacles de la nature et du climat. En dépit de prédictions sinistres et longtemps répétées, le succès est devenu certain: les chefs ont jeté leurs armes ; les Arabes commencent à com- prendre ce que vaut notre protection ; notre colonisation, qui n'est encore qu'à ses débuts, s'avance sous d'heureux auspices, et dans un champ sans limites, telle qu'aucune