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LE PÈRE DE LA CMA1ZE. 311 pontificale se montrait réservée jusqu'à la froideur vis à vis du Roi de France ; elle allait jusqu'à se rapprocher secrètement de tous ses ennemis, et personne n'ignorait que, dans son intimité, le Saint-Père exerçait tous les jours sa verve ironique contre les bulletins de triomphe que lui expédiait à chaque ordinaire le nonce apostolique à Paris. » Les réfugiés protestants n'ont jamais tenu un autre langage, et c'est eux qui ont fini par accréditer cette erreur acceptée pendant deux siècles, et sans contrôle, par l'opinion publique. Or, examinons sur ce point la vérité. Des allégations d'une nature aussi grave exigent nécessairement des citations. Voici d'abord ce qu'écrivait à Louis XIV M. de Barrillon, son ambassadeur à Londres : « Les louanges que le Pape a données dans le consistoire à l'Edit de Votre Majesté sont connues à Londres, et font voir combien est faux le bruit répandu par les factions, que le Pape n'approuvait pas cette mesure (1). » En effet, le Saint-Père, dans un consistoire qu'il tint exprès pour annoncer aux cardinaux la révocation de l'Edit de Nantes, loua hautement cet acte dans un discours latin. Ce fait est con- signé dans la correspondance des PP. Mabillon et Montfaucon (2). Ce n'est pas tout : un Te Deum fut chanté à Rome dans toutes les églises, pendant la célébration duquel on ne cessa de tirer le canon du château Saint-Ange ; et durant deux jours consécutifs, le Pape « ordonna dans Rome des feux de joie et des illumina- tions (3). » Enfin, voici deux pièces officielles de la plus haute importance, et qui lèvent tous les doutes. L'une est une dépêche du duc d'Estrées à Louis XIV, pour lui faire connaître l'impression que (1) Dépêche de M. de Barrillon, avril 1686 {Archives des affaires étran- gères'). (2) Corresp. des PP. Mabillon et Montfaucon, publiée par Valéry, t. I, p. 175. Voir aussi l'Hist. de Madame de Maintenon, parle duc de Noailles, t. H. p. 450 et suiv. (3) Idem,