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LE PÈRE DE LA CHAIZE. 297 « Les protestants, ajoute d'Aguesseau, étaient prêts à s'expo- ser aux dernières extrémités pour maintenir la liberté de cons- cience et l'exercice public de la religion réformée. » Plusieurs écrivains, entre autres le cardinal de Bausset, confir- ment le récit de l'austère janséniste. Dans leur projet d'union générale, les protestants déclaraient : « qu'ils étaient résolus d'obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes. » Ce plan fut saisi par le chancelier le Tellier et mis sous les yeux de Louis XIV, ainsi qu'en fait foi le célèbre Mémoire du duc de Bourgogne , sur la révocation de l'Edit de Nantes. Cette insurrection, dans laquelle le sang coula, nécessita un grand appareil de forces militaires. Le marquis de Louvois fit occuper en même temps le Languedoc, le Vivarais et le Dau- phiné pour désarmer les rebelles et rétablir l'ordre. Telle fut la première origine des dragonnades. « La trêve de vingt ans, conclue en 1684 , dit le cardinal de Bausset, promettait un long calme à la France et à l'Europe. Elle laissait dans une inaction forcée un ministre dont le génie n'aimait à se nourrir que de conceptions militaires et dont le crédit, tout puissant pendant la guerre par le besoin que l'on avait de ses talents , pouvait perdre une partie de son influence dans les loisirs de la paix (1). » L'occasion d'agir était trouvée. L'insurrection des calvinistes offrait au secrétaire d'Etat de la guerre une raison suffisante d'intervenir dans un domaine qui semblait placé si en dehors de ses fonctions et qui, depuis plu- sieurs années , faisait partie des attributions de M. de Château- neuf. Aucun doute n'est possible sur la direction presque exclusive et sur l'autorité absolue qu'usurpa dans cette affaire le marquis de Louvois. Les historiens sont unanimes sur ce point. Rulhière , qui a étudié avec le plus grand soin , quoique à un point de vue systématique, la question de la Révocation, n'hésite point à dire que le célèbre ministre « ne se voyant pas consulter « sur l'œuvre des conversions eut le talent de s'emparer de la con- (1) Vie de Kossuet, par le cardinal de Bausset, t. iv.