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228 LETTRES 1VE GUlCHENON. tudes d'une piété plus convenable à un moine qu'à un souve- rain. Humbert III, céda spontanément à cet entraînement, qui, durant le cours du douzième siècle, poussa les hommes de la plus haute naissance h quitter le monde pour se vouer à la solitude et à la contemplation. Aussi, lorsqu'arriva pour lui le moment de prendre en mains les rênes de ses états, on le vit manifester un éloignement instinctif pour les affaires, et se dérober fréquemment aux devoirs qu'elles imposent pour aller partager la vie claustrale des moines d'Aulps et de Hautecombe. Plusieurs fois il arriva que ses sujets allèrent l'arracher à sa cellule pour faire face à quelque danger im- minent, alors on voyait le sang de sa race se réchauffer ; il quittait momentanément le froc pour endosser la cuirasse, et dans deux circonstances remarquables il fil sentir le poids de ses armes au dauphin viennois et au marquis de Saluées. Trois fois les gens de son conseil, auxquels il abandonnait volontiers les soins et les soucis du gouvernement, le con- traignirent à se marier pour éviter les troubles, que le défaut d'héritier et la vacance du trône après sa mort n'au- raient pas manqué de susciter à l'état, trois fois le vertueux Humbert dut se résigner à donner è ses sujets celle marque d'intérêt et d'attachement. On comprend aisément qu'avec des inclinations comme celles que nous venons d'indiquer, Humbert III ne pouvait faire cause commune avec Barbe- rousse qui, d'une part, s'était mis en guerre ouverte avec le pape légitime, et de l'autre, travaillait à concentrer dans sa personne tous les pouvoirs des princes, et à subjuguer l'Italie. Dans le principe, Humbert, au milieu de la conflagration suscitée par l'empereur, s'était efforcé de trouver une ligne de conduite qui lui permît de concilier la déférence qu'il devait à son suzerain, avec la soumission et la fidélité qu'il devait au Souverain-Pontife, mais les prétentions exagé- rées et les violences de Frédéric, à son endroit, ne lui permi-