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                       CHENAVARI,                          9

Il faudra que ta main, que ma rage transporte,
Du sang que je déteste assouvisse ma faim.

« Et tu me vengeras 1 Ce Roi dont les domaines
Montent des bords du Rhône aux cimes alpéennes,
Ce Roi, que ton orgueil aspire à détrôner,
Il proscrivit jadis cette tête blanchie !
Vers des bords étrangers il refoula ma vie !
Moi, Druide ! il osa, lui, Roi, me condamner !

« Et mon crime n'était que mon indépendance !
Jamais pour célébrer sa farouche vaillance,
Ma harpe n'exhala ses accords inspirés ;
Jeune et fier, je cha!htais la liberté, la gloire ;
Dispensateur sacré des pages de l'histoire,
Je refusai l'encens à ses vœux enivrés.

« J'ai, vingt ans, de l'exil vidé la coupe amère,
J'ai connu le dédain, j'ai connu la misère !
Mais, au fond de mon coeur, l'affront était resté!
Je revins inconnu ; j'espérai la vengeance ;
Je l'attendis longtemps ! —Pour prix de ma constance
Ton glaive brisera son crâne détesté.

« Voilà pourquoi ces bras dans mon sein t'accueillirent,
Alors que, fugitif, nos rivages te virent
Traîner l'ignominie attachée au vaincu ;
Et pourquoi, retrouvant mes forces éclipsées,
J'assemblai, j'augmentai tes troupes dispersées
Et relevai l'essor de ton vol abattu.

« Tu ne hais que le Roi ! moi je hais surtout l'homme.
Mais il faut que demain sa perte se consomme ;
Nos efforts réunis doivent le renverser.
Demain se livrera la bataille suprême ;
Ton rival confiant vient te l'offrir lui-même,
Mais mon art merveilleux saura le terrasser.