page suivante »
CHENAVARI. 7 Un homme l'attendait sur la grève déserte, Parmi les saules verts dont l'île était couverte ; Vieux Druide blanchi par la veille et les ans, Qui vivait ignoré dans cette solitude, Depuis qu'aux bords lointains, sa vaste inquiétude Avait, sous d'autres cieux, guidé ses pas errants. Du culte de l'Egypte il savait les mystères : Les savants Chaldéens et les Scythes austères, Les poétiques Grecs aux rêves fabuleux, Tour à tour, devant lui, déroulant leurs annales, Lassèrent sa pensée en d'immenses dédales ; La Gaule le revit infidèle à ses dieux. Maintenant, dédaigneux des vulgaires croyances, Son esprit va sonder les occultes sciences ; On dit qu'à ses accents obéit l'avenir ; Qu'à son gré se déchaîne ou se calme l'orage, Et que, parfois le soir, sur l'aile d'un nuage, Aux palais du Destin les astres l'ont vu fuir. Cependant son regard suit la barque sur l'onde : Elle approche aux efforts du vent qui la seconde, Rase l'île, et reçoit le Druide en son sein ; L'oeil ardent du guerrier scrute un moment sa face, Puis monte vers le ciel dont la foudre menace.... Debout, le nécroman sourit avec dédain. —« Fils des camps, tu pâlis, dit le vieillard sévère ; Toi, dont le cri joyeux était un cri de guerre, Pour la première fois ton cœur s'émeut, ce soir ! Tu pourrais reculer à cette heure suprême, Alors que sur ton front plane le diadème?... Ton avenir est beau, si l'horizon est noir. » — « Moi ! je reculerais quand il s'agit d'un trône ! Je combattrais le ciel pour ceindre la couronne !