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494 LA REVUE LYONNAISE reconnaître un salut, ne put m'offrir qu'un déjeûner à trois francs, vin compris, dont une bouillabaisse inférieure à celles de la Ré- serve, formait le principal et le moins maigre ornement. Les cendres de Lucullus ont dû frémir dans leur urne, pendant que je faisais de vains efforts pour m'assimiler des mets indécis, à la confection des- quels la main du baron Brisse était demeurée étrangère. Après le déjeuner, je me mis en devoir de visiter la ville, sans voiture ni cicérone, mais le Joanne à la main et la lorgnette en bandoulière. La place Nationale marque à peu près le centre. Elle est assez belle. Elle est plantée d'arbres et ornée, de bancs et de becs de gaz, ou, du moins, elle doit l'être aujourd'hui. Au milieu se dresse une colonne blanche sur le fût de laquelle je lis cette inscription un peu effacée et incomplète : « La conduite d'Antibes en 1815 ne sortira jamais de ma mémoire. — Paroles du roi à la députation du Var... » Le roi en question est Louis XVIII. En 1815, les habitants d'Antibes se défendirent vigoureusement contre les Alliés. La même année, ils mirent ingénument au violon les ambassadeurs de S. M. l'empereur et roi, qui venait, comme Henri IV, de débarquer au golfe Juan avec une petite armée pour reconquérir sa couronne. Auquel de ces deux événements se rapportent les « paroles du roi?» De l'autre côté, une main républicaine a gravé : « Colonne com- mémorative transformée en fontaine monumentale. » Et, de fait, les maçons antibois étaient fort occupés, à ce moment-là , à flan- quer la colonne de quatre bénitiers en marbre blanc qui, vraisem- blablement, sont destinés à verser de l'eau dans un grand bassin rond en ciment, construit au-dessous. A l'est, s'ouvra une autre petite place, assez semblable à un tri- vium de Pompéi, ornée d'une fontaine, « monumentale » aussi probablement. De là partent deux ruelles : l'une, tortue et plon- geante, se casse le nez contre le mur d'enceinte; l'autre, grimpante et tortue, débouche en face de l'Hôtel-de-Ville, grande bâtisse sans prétention aucune. La place Massèna à droite et la rue Aubernon, son prolongement, à gauche, forment au-devant une fort belle pro- menade. De la rue Aubernon on descend au port par une ancienne porte, autrefois munie d'un pont-levis, et qui a conservé comme un ^etiï cachet vaub ânes que. Sur lecoursMasséna, ungrand vilain mur,