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72                           LA R E V U E      LYONNAISE



                              LES LAPINS DU ROI
                                                                QUOM dono i paure,
                                                               Dono à Dieu ! ...


   Une fois, il y avait un roi qu'on appelait monsieur Sire.
   Ce roi avait une fille belle comme le jour et gentille comme un sou. Aussi, le
dimanche, à la sortie de la messe, faisait-elle envie à plus d'un.
   Lorsque sa fille fut^grande et d'âge à marier, le roi lit tambouriner par coins et
recoins que celui qui lui g-arderait ses lapins aurait sa fille en mariage.
   Les vieux généraux d'armée, les maréchaux à barbe grise retirèrent leur en-
jeu; les jeunes diplomates se rongèrent les moustaches et les fendants de grand
nom restèrent tout interdits; car le roi avait donné sa parole que, s'il en man-
quait seulement la queue d'un, il brûlerait les reins au gardien!
   Les envieux écoutaient et n'osaient pas parler ; cependant le faraud de la veuve
Mourguete risqua le coup.
   Un beau matin, sa mère le trouva endimanché, garnissant son panier de pro-
visions pour partir.
   — Où vas-tu, faraud? lui dit la veuve.
   — Je vais garder les lapins de monsieur Sire, mère. Si jo gagnais la fille
comme vous seriez contente, vous n'auriez plus à craindre pour vos vieux jours.
Je suis un bon gardien, comme vous savez; j'ai gardé les dindes, gardé les bre-
bis, les chèvres folles et les bœufs difficiles à tenir, et je ne garderais pas les la-
pins? Ca serait trop fort !
   — A h ! ça, voyons, hargneux, lui dit sa mère, vas te déshabiller et vas-t-en
travailler la terre, va, tu gagneras bien mieux.
   — Oh! il n'y a pas à dire, mère, quand tout devrait casser il faut que j ' y aille



                           LI LAPIN DOU RÈI
   Uno fes ravie un rèi que ie disien moussu Sire, qu'avié uno chato bello coume lou jour
 e bravo coume un sou,
   Tambèn, lou dimanche, d a sourtido de la messo, fasié lingueto en mai que d'un.
   Quand la chato sieguè d'âge à marida, lou rèi faguè troumpeta pèr eairo e pèr cantoun
 qu'aquèu que io gardariô si lapin, io dounariô sa iilio en mariage.
   I,i vièi generau d'armado, li manescau à barbo gnso retirèron sa misso ; H jouine diplou-
 mat se rousiguèron li moustacho, e li fandan de grand noum restèron merdo-encoulaire; car
 lou rèi avié douna sa paraulo que so n'en mancavo soulamen la co d'un, brularié au gardian
li sét courejo î
   Lis envejous fasien l'escouto e n'aulavon beoa; pamens, lou farot de la véuso Mingueto
asardè lou paquet.
   Un bèu matin, sa maire l'atrouvè endimencha quegarnissié sa hiasso pèr parti. — Mounte
vas, farot, je fai ia vèuso.
   — Vau garda îi lapin de Moussu Sire, maire; se gagnave la fi ho, comme sarias eountènto ;
n'aurias plus à vous esmôure pèr vôsti vièi jour. Siéu un bon gardian, comme sabès :ai garda
li dindo, garda l'avé, li cabro boulegueto, e ii brau defecile à remouchma, e gardarièu pas
de lapin?... Sarié trop fort !
   — Ah ! ço, vai Peehinchm, ie vèn sa maire, vai te desabiha, vai, e marcho-t'en fouire, que
gagneras mai.
   — Oh! i'a pas de mitan, maire, quand tout petèsse faut que i'ague, e qu'adugue la chato.
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