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                      F A N T A I S I E S NIÇOISES                265
laquelle ont lieu, deux fois par semaine, des joutes courtoises entre
des bœufs avant la lettre et de souples et agiles chevaliers de la
cape et de la banderille.
   Il a une histoire, ce cirque. Lorsque sa création eut été décidée
dans les abords du boulevard Gambetta, — allusion délicate au sé-
jour que fît jadis le célèbre tribun en Espagne, — on discuta long-
temps avant d'arrêter les plans définitifs. YÎ imprésario,qui voulait
faire grand, ne pensa d'abord à rien moins qu'à installer sur son
terrain le Golysée de Rome. Il s'agissait uniquement de le louer
pour la saison au gouvernement italien, de le démonter sur place,
et de le remonter brique par brique, sous la surveillance d'un
comité d'architectes et d'archéologues institué à cet effet. Des pour-
parlers sérieux furent même engagés, dans ce sens, avec la Com-
mission des Monuments historiques du pays d'où nous vient l'or-
chestre des mandolinistes. Mais la docte commission refusa net de
priver Rome, à la veille du carnaval, d'une attraction de cette
valeur, signalée dans tous les guides nationaux et étrangers, et dont
l'absence, même momentanée, aurait pu jeter le plus grand discré-
dit sur la Ville Éternelle. Elle allégua pour excuse sa crainte de
voir quelque partie du monument confié à sa garde égarée ou dété-
riorée dans le trajet, et la difficulté qu'il y aurait, pendant les
représentations, d'empêcher des Anglais fanatiques de gratter les
briques avec leurs ongles, ainsi que certains l'ont fait au bois des
bras du fauteuil de l'Arioste, que l'on conserve dans la grande
salle de la Bibliothèque de Ferrare.
   Dans le fond, M. le Toréador en chef ne fut pas fâché de ce ré-
sultat. Les frais de transport auraient été énormes, sans compter
que l'amphithéâtre de Flavien aurait exigé, une fois placé, des tra-
vaux considérables d'appropriation et d'aménagement. Un ingénieur
des ponts et chaussées offrit alors de creuser des arènes dans le sol.
 Un autre proposa de les adosser à la montagne, comme le théâtre
romain d'Orange, combinaison qui présentait au moins cet avan-
tage de donner un pendant au palais de l'Exposition. Enfin, après
mille essais et tâtonnements, on s'arrêta au parti de construire en
bois de sapin, qui est, comme chacun sait, la matière première de
la construction la plus légère et la plus élégante, une sorte de
vaste cirque, sur les gradins duquel trois mille personnes peuvent