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                           CAUSERIES NIÇOISES                   357
   Supposons que l'Italie entreprenne une guerre. Il y a une place
forte à bombarder. L'opération est conduite avec méthode et éco-
nomie. La ville détruite, le ministre de la marine suppute la dé-
pense, et trouve qu'il n'en aurait pas coûté davantage à ses collè-
gues des Finances, des Beaux-Arts et des Travaux publics, pour
payer les dettes de Florence, construire une façade au dôme de
Milan, achever les fouilles de Pompéï, exhumer Herculanum et
Stabies, ou dessécher les marais Pontins.
   Enfin, comme les choses humaines vont toujours en progressant,
nous aurons bientôt des canons dont le tir reviendra à trois mille
francs; puis un peu plus, quatre, cinq, huit et dix mille. Et, dans
un avenir plus éloigné, il ne faudra pas songer à faire parler
l'artillerie à moins de vingt-cinq mille francs le coup.
   Et, ce jour-là, les guerres coûteront si cher, si cher, que les
douanes, les octrois, les monopoles, les impôts nouveaux, les
centimes additionnels, les plus formidables emprunts, la.banque-
route même, n'y suffiront plus. Les nations les plus riches n'auront
pas les moyens de se battre. Il se produira alors ce fait singulier
que, après s'être massacrés pendant six mille ans, pour se voler
des troupeaux,, des esclaves, des forteresses, des provinces et des
milliards, les hommes ne pourront plus, faute de ressources, se
distribuer les moindres horions, et seront forcés de vivre en paix
les uns avec les autres, par économie.

                                           François COLLET.




    AVRIL 1884.   — T.   VIL