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                               BIBLIOGRAPHIE                                      529
rellement, il a dû ouvrir les livres saints les plus anciens, c'est-à-dire ceux des
religions boudhiques ou brahmaniques et étudier les monuments de ces peuples,
représentant des dieux connus, d'après les légendes iudoues, avec leurs     attributs.
Or, en examinant ces attributs, il est arrivé à reconnaître, que parmi eux se
trouvent certaines coquilles toutes spéciales, que les divinités, porteurs de con-
ques, sont encore aujourd'hui l'objet de la vénéiatkm de quelques peuples de
l'Orient, et que les mollusques attachés à leur symbole, sont devenus par exten-
sion l'objet de cultes particuliers. M. Locard a pu même démontrer que ces mol-
lusques sont des monstres, au point de vue de l'histoire naturelle, en ce que leur
enroulement est en sens inverse de la coquille normale; et il a pu conclure de là
que, si on adore ce monstre, ce n'est pas parce qu'il est beau, mais simplement
parce qu'il est différent de ses semblables et que cette différence a dû frapper
l'imagination naturellement superstitieuse des Orientaux.
   Sous le nom de Malacologie scientifique,        M. Locard a examiné ensuite,
d'après les textes eux-mêmes, quelles étaient les connaissances pédagogiques
des anciens au sujet des coquilles. Partant des Aryas, il a passé successivement
en revue les Hindous, les Egyptiens, les Hébreux, les Grecs et les Latins, c'est-
à-dire les premières sociétés de notre ère. Cette revue rétrospective est du
plus sérieux intérêt, au point de vue de l'histoire naturelle, car aucun écrivain
moderne n'a encore songé à l'écrire. M. Locard est entré le premier dans cette
voie.
   Dans un chapitre subséquent, et pour ne rien négliger, M. Locard examine les
principaux usages auxquels les mollusques ont donné lieu et quels services on a
pu attendre d'eux, c'est-à-dire les applications de la malacologie dans l'antiquité,
soit pour la parure ou l'ornementation, soit dans la teinture et le tissage des
étoffes, soit au point de vue médicinal, soit même dans M art culinaire. Au point
de vue gastronomique, la coquille joue des rôles bien différents ; tandis que Moïse
et les prêtres égyptiens la proscrivent dans l'alimentation, les Romains font des
folies pour l'amener sur leurs tables. L'huître et l'escargot avaient la préfé-
rence de ces derniers. Les poètes même chantèrent les mérites de l'huître qui
était apportée à Rome des plus lointains rivages.
   Enfin dans un dernier chapitre, M. Locard ne manque pas de parler du sym-
bolisme auquel les mollusques ont pu donner naissance, l'emploi qui en a été fait
dans les arts comme ornementation et le parti qu'en a su tirer la littérature an-
cienne et moderne. A l'appui de ses assertions, l'auteur cite de nombreux textes
grecs, latins, hébreux, hindous, égyptiens qu'il a dû consulter, et on ne lit pas
sans un vif intérêt ses aperçus tout nouveaux sur des textes connus qu'il a su
interpréter d'une façon précise, parfois même très originale, comme n'a pu le
faire qu'un spécialiste.
   Le livre de M. Locard ne se recommande donc pas seulement aux savants,
aux naturalistes, mais aussi à l'homme du monde qui aime qu'on l'instruise par
des livres où la science est mise à sa portée, où cette science ne se traîne pas
dans des chemins déjà battus, ou tant d'autres ont déjà passé, et qui lui indique
des découvertes nouvelles, inattendues, presque surprenantes et présentées dans
un style clair, précis, toujours élégant et tenant sans cesse l'intérêt en haleine.
                                                                    X. X .