Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
                    UN SCULPTEUR FÉLIBRE                          337
    « Vous n'ignorez pas qu'il était de stature grande et svelte. Les
portraits ne doivent pas vous manquer. Lamartine professait une
grande estime pour le statuaire AdamSalomon qui lui avait fait son
buste. J'ai revu ce buste, il n'y a pas longtemps, et je l'ai trouvé
très beau. Je comprends que le poète fut content de son statuaire.
En somme, comme beauté de tête et comme noblesse d'attitude, ne
craignez pas de viser à l'idéal. Vous atteindrez à peine le simple
naturel du grand homme lui-même. . »
   Quand la poussière de lourd réalisme et de sec positivisme qui
nous aveugle et nous suffoque, se sera dissipée, on rendra pleine
justice à Lamartine et les paroles éloquentes de Mistral ne paraî-
tront pas exagérées à une génération plus équitable que la nôtre,
plus éprise de vues générales, de grands et beaux horizons. C'est,
du reste, l'opinion d'un des juges les plus délicats et les plus auto-
risés en matière littéraire, M. Jules Claretie.
   L'esquisse nouvelle d'Amy et Boisseau obtint le quatrième prix ;
ils eurent l'honneur d'être classés avant de nombreux et même
d'illustres concurrents.
   Dans la lettre que nous venons de transcrire, il est aussi question
d'un bas-relief en marbre blanc, représentant les trois nobles et
pacifiques héros du Félibrige : Mistral, Aubanel, Roumanille et
d'un petit buste d'Amy.
   « Le groupe des Félibres, ajoute Mistral, est tout à fait mo-
numental. Vous avez notamment donné à mon portrait un caractère
mâle qui, ce me semble, est moins accentué dans le médaillon pri-
mitif. Au lieu de la plume qui est au bas, j'eusse préféré une cigale
ou un tambourin rustique. Nons sommes plus chanteurs qu'écri-
vains... La Mireille est fort belle, une vivante chato des bords du
Rhône plantureux !... »
   Sur la page blanche, le glorieux poète a tracé le petit tambourin
qu'il veut mettre sous les portraits des trois Félibres.
   Ce bas-relief parut au salon de 1875 avec un portrait de Méry,
en plâtre, qui est resté dans l'atelier du sculpteur. Le groupe des
Félibres fut acheté par l'Etat qui le donna au Musée Calvet, d'Avi-
gnon, où il figure dans la salle des sculpteurs modernes. Avignon
est, à vrai dire, le principal foyer du Félibrige. Il était juste
qu'il reçut les portraits de ses trois grands fondateurs.