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LA CORRESPONDANCE DE VOLTAIRE l 11 y a bien des hommes dans Voltaire. Il y en a d'éminents, mais il y en a aussi d'odieux, il y en a de honteux, il y en a de méprisables,et je n'ai pas à revenir à cet égard sur les jugements qu'ils ont mérités : si sévère que fût la sentence, je serais tenté de la trouver trop indulgente et trop douce. Mais laissant de côté, a dessein, le poète, le philosophe,le satirique, l'incrédule, le pam- phlétaire, négligeant l'auteur dramatique et l'historien lui-même, et n'ayant souci que de l'écrivain au point de vue de la forme littéraire, je ne crois blesser ni le bon sens ni le bon goût de per- sonne en avouant que je donnerais ses œuvres complètes, j'en- tends les grandes œuvres, pour certaines de ses lettres. Le public s'est depuis longtemps^ prononcé : il est de mon avis ou plutôt je suis du sien. Pour un lecteur du Dictionnaire philosophique, voire même de Charles XII, il y en a cent des lettres à Cideville, à d'Argental, au maréchal de Richelieu. Que serait-ce s'il s'agis- sait de la Henriade, de Zaïre même ou de Mèrope? Sa prose a tué ses vers. L'esprit net, pétillant, naturel est encore plus rare en France, de nos jours, qu'un grand drame ou qu'une tragédie, Il faut, bon gré mal gré, retourner à cette source intarissable et toujours limpide qui s'épand à pleins bords. Aussi nous y puisons Dieu sait comme : pesantes ou légères, tous nous allons en secret i Œuvres complètes de Voltaire, nouvelle édition publiée par M. Louis Moland. Paris, Garnier frères, 1830-1883, — La Correspondance seule forme 18 vol. in 8.