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186                  LA REVUE LYONNAISE
   Il fallait des promenades, des jardins. Voici, le long de la baie
des Anges, un quai unique au monde, se développant en courbe
gracieuse du cap de Montboron jusqu'au port d'Antibes, large,
avec trottoir pour les piétons, chaussée pour les voitures et les
cavaliers, bordé de résidences princières. Voici des avenues comme
il en existe à peine dans les plus riches quartiers de Londres, des
parcs, des jardins suspendus sur le Paillon. Des routes merveilleuses
rayonnent dans toutes les directions. Que vous dirai-je ? Vous ne
vous êtes pas seulement aperçu que les neuf dixièmes du quai r e s -
tent à faire, qu'il n'y a pas, dans tout Nice, quatre avenues remar-
quables, et que les futurs jardins suspendus sur le Paillon ne sont
encore indiqués que par des pierres d'attente aux extrémités des
routes qui soutiennent le prolongement de la place Masséna.
   Croquis de jardins et de promenades.
   Vous voulez des édifices publics, des lieux de plaisir? Au cœur
de l'ancienne ville, une façade, derrière laquelle il n'y a rien, joue
la préfecture à s'y méprendre. Une vieille masure est intitulée auda-
cieusement « Palais de justice ». Et le «palais» fait oublier la
masure. Vous lisez au-dessus d'une porte : « Bibliothèque de la
Ville ». Et l'idée ne vous vient même pas de vous assurer si réelle-
ment la Ville possède une bibliothèque. Ailleurs, un vaste enclos est
encombré de pierres de taille, de briques et de moellons. Le bruit
court que là s'élèvera, avant vingt-cinq ans, un opéra italien. Il
vous semble déjà le voir brûler. Sur le Paillon même, un gigan-
tesque amoncellement de matériaux de toutes sortes représente un
casino. C'en est assez. Il existe. Vous le voyez. Vous avez presque
envie de prendre un abonnement. Nice est couverte de palais, elle
regorge d'édifices publics, elle est encombrée de lieux de plaisir.
    Croquis ! croquis ! croquis !
    Qui a parlé d'exposition? Les hauteurs du Piol sont méconnais-
 sables. Des terrassements faits à la diable indiquent des esplanades,
 des jardins, des allées, des massifs. De vastes, d'interminables
 chantiers où l'on cloue, décloue, charrie, frappe, martelle sans
 relâche, esquissent un palais. Une douzaine de cadres en bois noirci
 et quelques bibelots figurent des vitrines et des objets exposés. Plus
 bas, d'autres mouvements de terrain, des tranchées, des remblais.
Deux avenues idéales convergent vers cette exposition chimérique.