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           LES F A C T E U R S DES FORMES DU LANGAGE                              117
même d'ordre logique qui préside à leur classement rigoureux et à
leur propagation absolument régulière. La science qui les embrasse
n'est donc, par la nature même des choses, qu'une classification
presque immuable quia reçu sa forme définitive, ou à peu près, dans
nos anciennes grammaires, abstraction faite, toutefois, des parties
consacrées à ce qu'on appelle les exceptions.
    Les exceptions, en effet, sont de l'autre domaine ; c'est par elles
que la nature reprend et affirme de temps en temps ses droits, ne
serait-ce que pour empêcher la prescription; elle en fait comme les
amorces des séries analogiques de l'avenir.
    Avec les suffixes et les racines, les exceptions, qui tiennent géné-
ralement de celles-ci et de ceux-là, forment tout à la fois le lot de la
nature considérée comme facteur du langage, et l'objet de la gram-
maire historique, qui n'est autre chose que la science de la vie
et des parties vivantes du langage.
    Mais nous arriverons facilement à déterminer son rôle d'une
façon plus précise encore, si nous nous rappelons que les formes
vivantes du langage sont issues les unes des autres. Etablir leur
filiation ou leur chronologie, tel est donc, en dernière analyse, le
but de la grammaire historique ; et comme ce but se confond néces-
sairement avec l'étymologie, et par là avec l'histoire même du dé -
veloppement de l'esprit humain, vous voyez quelle belle moisson
cette science peut réserver aux efforts de ceux qui la cultivent.

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     Le but de la grammaire historique est de fournir une méthode pour la classifi-
cation des formes naturelles du langage. Jusqu'à présent on n'a rangé ces formes qu'en
tenant compte de l'ordre alphabétique de l'initiale de chacune d'elles. N'est-il pas
possible et permis d'imaginer un système qui repose sur quelque chose de moins
extérieur et de moins artificiel?

                                                 PAUL REGNAUD.




    FÉVRIER 1884. — T.    VIL