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76                           LA R E V U E        LYONNAISE

    — Je vois que tu es un brave garçon et, pour cela, tiens, mon ami, voici un
sifflet. Lorsque tu voudras rassembler tes lapins, tu n'auras qu'à siffler, et sur-
le-champ les lapins viendront à ta rencontre.
   Le garçon prend le sifflet, lui dit merci et tous trois se font leurs adieux; puis
chacun part de son côté.
   Le jeune fils de Mourguete arrive au soleil couchant devant la porte du châ-
teau ; il entre, explique sa venue, est bien vu au château, comme l'avait été son
frère, et le lendemain on lui donne aussi sept lapins : Perce-Buisson,       lîabastin,
Coureur, Fureteur, lloucassié, Griset, et Pëlachin. Avec eux le garçon gagne
la crête de la montagne et les lâche en liberté.
    Cependant, quand dix heures arrivent, le jeune homme essaie le sifflet. Il
siffle et les lapins, comme l'avait dit le mendiant, au signal du divin instrument
(caries deux pauvres qui demandaient ainsi leur pain étaient le bon Dieu et la
Sainte-Vierge) les lapins tournent autour de lui, soumis comme de blancs
agneaux.
   De là vient le dicton :
    « Donner aux pauvres, c'est donner à Dieu ».
   Content comme un oiseau dans l'air, dès que vint la nuit, le garçon s'en r e -
tourne avec les lapins qui sautent devant lui et les gens ébahis s'arrêtaient par-
tout, émerveillés à la vue de ce spectacle.
   Le roi sut tout, tint sa parole et lui donna sa fille en mariage et il m'a été dit
qu'ils vécurent longtemps ensemble, heureux comme des rois.
                                                   EUGÈNE       BERTRAND,           1883.



    — Vese que sies un brave drôle, tè, moun ami, vaqui 'no sibleto, e quand vou Iras aeampa
 ti lapin, n'auras qu'àsibla, e, sus lou cop, li lapin te vendran à l'endavans.
    L'enfant pren la sibleto, ie dis gramaci, e touti très se fan sis à-Diéu-sias. Pièi, cadun tiro
de soun Caire.
    Lou jouine de la Mingueto arribo à soulèu tremount davans la porto dou castèu ; intro,
esplico sa vengudo. Gouino soun fraire, es bèn vist au castèu, e l'endeman ie dounèron sèt
lapin trauco-bouissoun, rabastin, eourriôu, furetoun, roucassié, griset e petachin. Em'acô,
lou drôle gagno li crestèn, e ii bandis en liberta.
   Pamens, quand venguè eiça sus li dès ouro, lou drôle assajo lou slblet, siblo, e li lapin,
coume avié di lou paure, au cop dou divin estrumen (car li dous paura qu'ansin demandavon
soun pan, èro lou bon Dieu emé la Santo-Vierge), li lapin ie viron à l'entour, soumés coume
de blancs agnèu.
    D'aqui vèn lou dire que se dis : Douna i paure, es douna à Dieu.
    Countènt coume un miquelet, à l'intrado de la niue lou drôle s'entournavo, li lapin io
autavon davans, e li gènt aplanla s'arrestavon mereviha de vèire aco.
   Lou rèi sache tout, tenguè sa paraulo, ie dounè sa fiho; e m'es esta di que visquèron
long-tèms, urous coume de rèi.
                                                          ANSELME MATHIEU,             1879.