Revue lyonnaise » n°7 ( 1884 ) » pp.377

                            TROIS MOIS A VENISE                                      377
 doit y avoir une atmosphère humide et brumeuse; c'est tout le
 contraire. L'air y est égal, nutritif et nullement lourd. Il est bon
 aux personnes atteintes de phtisie; on le recommande spécialement
 aux anémiques ; à ces derniers, le calme de la ville convient à
 merveille ; car on n'entend aucun bruit de voiture à Venise ; un
cheval y est même une curiosité1. En 1630, la peste a fait périr
44,000 personnes à Venise ; mais cette peste fut générale en
Europe.
    Quant aux 2000 rues de Venise, la plupart n'ont guère plus
de 2 ou 3 mètres de large ; presque toutes sont bordées de jolis
petits magasins. A chaque instant, quand vous les parcourez,
vous découvrez, ici, une madone, devant laquelle brûle une lampe ;
là, d'antiques blasons artistement fouillés, des inscriptions.
    Toutes les cours des habitations ont, généralement, un puits
(pozzo), ayant la forme d'un chapiteau antique, chargé d'inscrip-
tions, de feuillages, de blasons fort curieux. Chaque matin, ces
puits qui ont une grille fermée à clef, sont ouverts. Des femmes
du peuple, chargées de deux petits sceaux de cuivre, accrochés
aux deux bouts d'un bâton placé sur l'épaule, et coiffées d'un petit
chapeau d'homme, puisent à qui mieux mieux. Autre usage :
quand un facteur de .la poste frappe à la porte et crie le nom du
destinataire d'une lettre, aussitôt, un petit panier descend de
l'étage indiqué, au moyen d'une corde, et prend la correspondance
qui lui est destiné. Notez, encore, qu'à l'entrée principale dechaque
habitation, tout locataire a une sonnette qui lui est spéciale ; à
côté de la sonnette est placé le numéro de l'étage. Enfin la plupart
des croisées sont ornées de rideaux jaunes ou verts ; quelquefois
rouges.
    Venise a trois principaux théâtres : ceux de La Fenice, de Gol-
cloni et de Malibran. Celui de la Fenice passe pour le troisième de


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     Un cheval, à Venise, est une rareté. Le peuple vénitien va voir ce quadrupède
au Dépôt du Jardin des plantes pour les exercices de la cavalerie. On ne rencontre
aucun chien dins les r jes de Venisj. Gela lient, dit-on, à la taxe élevée qui leur est
appliquée. Il n'y a pas, non plus, de poussière dans cet!e ville. La mer,qui l'environne,
supprime presque les brosses à vêtements, ce qui n'est pas un petit avantage.
Gomme toutes les rues sont admirablement dallées, dès qu'il pleut et qu'il y a le
moindre coup de soleil, le pavé est sec et agréable.