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                           TROIS MOIS A VENISE                                     373
constitué le Conseil des Dix. En 1344, les Vénitiens commencèrent
à régner sur la terre ferme, en s'emparant d'abord de Padoue, puis
de Vicence, de Vérone (1405), de Trévise, du Frioul, de Bresse, de
Rergame, de Crème, duPolésine. Ils obtinrent ensuite Chypre.
   A la fin du seizième siècle, Venise, devenu le centre du com-
merce, de la richesse et de la civilisation, arriva à l'apogée de sa
grandeur. La République ne succomba qu'en 1792. Bonaparte dé-
créta la chute de Venise qui avait refusé son alliance. Venise fut
donné à l'Autriche par le traité de Campo-Formio (1797). En 1848,
cette cité se reconstitua pour peu de temps en République; mais elle
dut se rendre aux Autrichiens (1849). Cédée à la France en 1866,
à la suite de la guerre entre l'Italie et l'Autriche, elle fat aban-
donnée à l'Italie, à laquelle elle appartient actuellement.
   La population de Venise est de 135.700 habitants; vous savez que
c'est une ville unique au monde en son genre. Elle s'élève au milieu
des lagunes sur cent vingt-deux îles, réunies entre elles par trois
cent soixante-sept ponts. Le Grand-Canal sépare la ville en deux
parties, reliées par le magnifique pont du Rialto, construit en 1588.
Ce pont est chargé d'un grand escalier sur lequel on a élevé,
à droite et à gauche, de petits magasins. Du sommet, onaperçoitle
Grand-Canal ; des centaines de gondoles. Un va-et-vient incroyable
anime ce vieux pont qui, le soir, présente un spectacle vraiment
magique. C'était, pour moi, un charme singulier que de gravir,
chaque jour, le pont du Rialto, de •m'accouder sur la balustrade, et
d'observer le mouvement de toutes les gondoles, d'entendre les cris
des marchands qui s'y installent.
   Le jour même de mon arrivée à Venise, dès neuf heures du
matin, je cours sur la place Saint-Mare. C'est la merveille des
merveilles! Figurez-vous, au fond, l'incomparable basilique
Saint-Marc; à droite, le palais des doges, le Campanile, c'est-à-
dire le beffroi, grande tour carrée, isolée sur la place, élevée de
98 mètres 1 ; à gauche, la Tour de l'horloge, construite en 1497,

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      Pendant mon séjour à Venise, un malheureux jeune homme, appartenant à une
honorable famille, fou d'amour, désespéré de n'être pas payé de retour (il aimait la
fille d'un amiral), s'est précipité du haut du Campanile. Son corps a été relevé, aus-
sitôt, dans un état affreux. Depuis la fondation du Campanile (dixième siècle), plus'de
cent personnes se sont suicidées de la même manière.
      AVRIL 1884.   — T. VII.                                                 24